Premier Grand Cru Classé

L’Inespérée – Christian Bobin

« La vie en société c’est quand tout le monde est là et qu’il n’y a personne. La vie en société c’est quand tous obéissent à ce que personne ne veut. L’écriture c’est une façon d’échapper à cette misère, une variation de la solitude au même titre que l’amour ou le jeu – un principe d’insoumission, une vertu d’enfance »

“Nous sommes faits de cela, nous ne sommes faits que de ceux que nous aimons et de rien d’autre.”

Je m’imprègne, je m’incline …

Comme toujours Christian Bobin nous enveloppe de douceur, nous touche en profondeur, nous tend la main et nous invite à une leçon de bonheur, dont il semble détenir le mot de passe. Ses mots vous bercent, vous inondent d’amour, vous rapprochent de la lumière. Oui on peut être heureux de peu, pourvu que l’on accepte de se laisser porter vers des petits bonheurs simples. Et ces bonheurs sont à portée de tous, il suffit de tendre la main, de se montrer humble et sincère.

L’auteur ne nous enseigne rien. Il énonce des vérités simples, parle de l’amour, de la mélancolie, avec des mots d’une grande beauté. Au milieu de nos vies trépidantes, il vient déposer une bulle d’oxygène.

On se laisse porter doucement par ces onze textes qui parlent d’amour, d’amitié, de la vie mais aussi du dédain de la société, de la télévision, un vrai gâchis pour cet homme assoiffé de pureté et de simplicité.

Et l’on n’a pas envie de se détacher de ce récit qui fait du bien tout simplement …

L’Inespérée – Christian Bobin, Gallimard/Folio

Article publié par Catherine le 9 mars 2010 dans la catégorie Premier Grand Cru Classé
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vin de table

Le Paquet – Philippe Claudel

J’ai vu ce petit livre chez un libraire, le nom Claudel était de bon augure, et j’ai acheté sans lire une ligne. 10 euros pour 85 pages. Il s’agit d’une pièce de théâtre, en fait. Autant vous prévenir tout de suite je suis allergique au théâtre, à la poésie, au cinéma américain, au Goncourt, et à bien d’autres choses.

Une courte pièce jouée par un seul acteur qui transporte amoureusement un paquet, dont on peut tout supposer. Contient-il un cadavre, des souvenirs, de vieilles reliques? La solution à cette énigme ne sera pas donnée. Cette pièce est une sorte de diatribe qui laisse parfois perplexe, qui peut horripiler aussi. Ce paquet est un peu lourd. Il peut avoir du mal à passer. L’émotion tarde à venir. Ce monologue un peu intello risque de ne pas séduire un large public..

Bien entendu, il est difficile de se faire une idée à la lecture. Il faut voir comment elle sera interprétée. Elle sera interprétée par Jugnot Gérard.

Un extrait : “Brigitte Bardot est une salope mais j’suis trop con pour la baiser !”. ( x 3)

Ben moi j’aime bien BB, elle a sauvé des milliers de bébés phoques. Pourquoi en parler ainsi ? Je ne vois pas bien l’utilité de ce genre de réplique, d’autant qu’elle n’est pas spécialement bien amenée.

A voir au théâtre, peut-être, mais à la lecture ce texte ne me semble guère convaincant…

Le Paquet – Philippe Claudel – Éditions Stock – Au petit théâtre de Paris cette année.

Article publié par Noann le 8 mars 2010 dans la catégorie vin de table
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Comestible ?

Le nouvel amour – Philippe Forest

L’auteur et son épouse Alice ont vécu un drame : la perte de leur fille Pauline, âgée de 3 ans et atteinte d’un cancer …

Une torpeur morbide entoure le couple désormais et leur quotidien est anéanti par cette tragédie.

De cette désespérance naît le roman. L’auteur se regarde souffrir et prend le lecteur pour complice de son désarroi.

Il va rencontrer Lou, avec qui il partagera un amour sensuel évident mais qu’il n’arrive pourtant pas à vivre pleinement, ni dans son cœur ni dans son corps. S’ensuit alors un ballet incessant entre Lou et Alice, une sorte de voyage entre moments de désespoir et trêves de bonheur. Cette chorégraphie accablante finit par épuiser le lecteur, qui se met à sauter des bouts de récit pour échapper à une série de tergiversations de l’auteur, de silences pesants, à ce trop-plein d’impudeur, d’égocentrisme malsain même …

L’auteur ne parvient pas à nous donner un autre message que celui de sa propre souffrance à laquelle il s’agrippe et qu’il raconte de long en large nonchalamment.

Néanmoins, certains passages sont servis avec une plume élégante, de jolis mots mais la toile de fond de ce roman est maculée d’aigreur et de narcissisme déplacé.

Le nouvel amour – Philippe Forest, Gallimard

 

Article publié par Catherine le 8 mars 2010 dans la catégorie Comestible ?
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Cru bourgeois

Les âmes grises – Philippe Claudel

Le Nord-est de la France, un petit village à proximité du front où se massacrent les belligérants de la première guerre mondiale.
C’est par une « affaire » d’infanticide qu’on entre dans ce roman : on retrouve le cadavre d’une fillette en bordure du fleuve. Ce meurtre est donc la pierre angulaire du récit où, sous la forme d’une enquête plus introspective que professionnelle, le narrateur semble finalement partir à la reconquête de sa propre paix intérieure. A travers ses cahiers intimes, il va balayer en cercles plus ou moins concentriques, les événements, les mœurs et les relations qui unissent ou séparent les habitants du village : le procureur, le juge, l’institutrice, les villageois… En découle une peinture bien léchée de la société, des préjugés de classe, des comportements, des lâchetés des uns et des autres. Le tout dans les nuances déclinées d’un gris passant du plus clair au plus obscur.
Le premier tiers du roman suscite l’enthousiasme : Philippe Claudel possède un style riche, installe un décor, maitrise des personnages bien « croqués » et diffuse des ambiances auxquelles on ne peut qu’adhérer.
Mais, alors qu’on se laissait porter par un rythme bien orchestré, l’auteur rompt le charme et s’évade dans des digressions et des flash-back, au risque de laisser le lecteur en bord de route. Les bras ballants, il se retrouve perdu dans les méandres du monologue d’un narrateur perclus de doutes, de culpabilité, de désespoir, et au bout du compte, égaré lui aussi dans les brouillards de sa propre existence. Dommage. De la même façon, si l’on considère que les –images-, les allégories, les périphrases, les métaphores et autres formes rhétoriques participent à la beauté du style, ici, malheureusement, la surabondance aboutit rapidement à l’indigestion.
En résumé, allégé de ses longues errances déroutantes et d’un trop plein « d’exercices de style », ce roman aurait été un véritable trésor. Malheureusement, c’est seulement si le lecteur peut dépasser la torpeur qui le saisit à mi-parcours, qu’il découvrira un ensemble qui fait, malgré tout, un très bon roman.
J’ai donc bien aimé, mais…

Les âmes grises – Philippe Claudel– Editions Stock – le livre de poche

Article publié le 7 mars 2010 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

L’Apiculteur – Maxence Fermine

L’Apiculteur est un roman  typique de Fermine. L’histoire d’un personnage saisi d’une quête philosophique, racontée avec des mots simples en 200 pages, dont 67 blanches et 88 à moitié vides.

Cet Apiculteur est un gars un peu toqué, pris d’une envie de gagner de l’argent, d’abord avec du miel, ensuite avec de l’or. Miel et or se confondent dans ce récit métaphorique. Le mot “or” est mis à toutes les sauces ; le miel est d’or, le silence est d’or, l’or est d’or, l’urine de chameau est d’or… On ne compte plus les effets de style avec le mot “or” dedans, parfois un peu stériles. A part ça le récit est agréable.

J’ai apprécié la profondeur des descriptions, en particulier dans le périple africain – on s’y croirait – et puis le style léger. Ceux qui ont aimé Opium ou Labyrinthe retrouveront les mêmes recettes. Comme d’habitude il y a une femme qui se dévêtit facilement et qui s’enfuit le lendemain.

L’Apiculteur – Maxence Fermine. Albin Michel- Le livre de poche

Article publié par Noann le 4 mars 2010 dans la catégorie Cru bourgeois
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vin de table

Le mec de la tombe d’à côté – Katarina Mazetti

Une rencontre improbable dans un cimetière … voilà qui n’est pas banal. Un homme et une femme, deux personnalités aux antipodes l’une de l’autre, qui se croisent, se jaugent, vilipendent, maugréent, mais finissent par partager un banc, entre les tombes de leurs disparus.

Puis viendront les échanges … des corps plus que des âmes. Ils y trouvent tous les deux un bien-être, une sorte de complémentarité, l’amour même …

Très vite cependant, le fossé entre ces deux êtres se creuse … Il est agriculteur, vit seul dans la propriété de ses parents. Elle l’assomme avec sa vie culturelle, Le mec de la tombe d'à côtéses « bons mots », sa vie de citadine. Il l’insupporte quand il ne parle que de sa ferme et de sa mère.

Elle le dénigre,  n’accepte pas qu’il ne puisse quitter sa ferme pendant une semaine pour s’échapper avec elle. Il ne comprend pas qu’elle ne puisse se contenter des quelques moments passés à la ferme, entre les broderies hideuses que sa mère a accrochées au mur et l’odeur du bétail …

Puis vient l’abîme, l’incompréhension, l’irréparable …

C’est un roman divertissant, drôle parfois, mais l’on est vite agacé par les clichés dont l’auteur use et abuse.

J’ai été enthousiaste au début de l’histoire, tant par l’originalité de celle-ci que par les personnages que je trouvais émouvants mais très vite ce plaisir de lecture s’est émoussé, laissant place à un sentiment de déception… jusqu’à la fin du récit.

L’image de Désirée, bibliothécaire, citadine, férue d’art contemporain, frimeuse qui cherche l’Amour et celle de Benny, agriculteur, vieux garçon bourru qui cherche une femme à tout faire pour entretenir la ferme finissent par exaspérer.

L’auteur nous met en présence d’une snobinarde et d’un homme de la terre un peu rustre, deux êtres qu’a priori rien ne rapproche … Elle aurait pu, à mon sens, donner à ces personnages plus d’intensité et de richesse. Elle se borne à nous livrer de manière insipide et mièvre une histoire d’amour qui tourne au ridicule

Le mec de la tombe d’à côté – Katarina Mazetti, Poche

Article publié par Catherine le 4 mars 2010 dans la catégorie vin de table
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Grand vin

D’amour et d’ombre – Isabel Allende

Second roman d’Isabel Allende, après « La maison aux esprits », « D’amour et d’Ombre » entraîne le lecteur dans un Chili ravagé par la dictature militaire ; période de drames et de terreur pour une majorité, de cécité confortable et têtue pour une grande bourgeoisie qui s’accroche à des privilèges en voie de délabrement.

L’histoire est celle d’un amour qui ne grandira pas sur un lit de pétales de rose, mais sur le terreau macabre des assassinats clandestins aux heures les plus noires de la répression militaire.

Irène Beltràn, jeune fille bourgeoise et bohème, étrangère aux convenances de son milieu social, est journaliste. Francisco Léal, issu d’une famille rescapée de la guerre civile espagnole, résistant par tradition familiale, est son photographe de presse. Depuis toujours, Irène doit épouser un capitaine de l’armée : Francisco doit se contenter de l’amitié de la jeune fille.

Tous deux vont réaliser un reportage presque ordinaire pour la région : Evangelina,  une jeune paysanne épileptique qu’on dit un peu sorcière, fait des miracles. C’est ainsi qu’incidemment, ils soulèveront la chape de plomb scellée sur les massacres perpétrés par les acteurs de la répression. Poursuivis, menacés de mort, les deux jeunes gens se réfugieront dans l’exil.

Dans un style passant du tragique au comique, touffu et bigarré (ce qui n’est pas sans rappeler celui de Gabriel Garcia Márquez), Isabel Allende enchevêtre des univers que tout sépare, où vivent des personnages uniques et étonnants, parmi lesquels naturellement, se distinguent les femmes.

On ne peut ignorer le talent narratif de l’auteur, son sens du détail, son habilité à  brosser en profondeur les décors et les personnages.

Pour qui, comme moi, apprécie tout particulièrement la littérature latino-américaine, ce roman est un pur  bonheur.

D’AMOUR ET D’OMBRE- Isabel ALLENDE. Editions LGF/Livre de poche

Article publié le 4 mars 2010 dans la catégorie Grand vin
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Cru bourgeois

OPIUM – Maxence Fermine

Ce roman est tout à fait dans la même veine que “le labyrinthe du temps” ou “Neige”. Écriture simple, limpide, sans fioritures. Histoire simple. Un personnage principal et deux ou trois secondaires. Tout est simple, en fait. ce genre de récit a ses partenaires et ses détracteurs. Je fais partie du premier groupe, je n’aime pas trop l’inutile complexité.

En 1838, un lord anglais part à la recherche du “secret” de fabrication du thé, nouvelle boisson très prisée à l’époque. Son dessein principal est de s’enrichir et, comme tout bon anglais, d’acquérir la mainmise sur un domaine étranger. Il se retrouve dans la banlieue de Shanghai, aux prises avec le terrible Lu Chen, sorte de Bill Gates chinois de l’époque. Il y a aussi la évidemment-très-belle Luan, dont le évidemment-très-séduisant lord va s’amouracher au premier regard. Faut pas oublier les ficelles qui ont fait leurs preuves…

Cette historiette sans prétention m’a conduit jusqu’à la dernière ligne en un peu plus de deux heures. Ce fut un bon moment de détente.

Seul bémol : l’auteur décrit assez peu et mal l’atmosphère si particulière du Shanghai de l’époque. Changez Lu Chen par Jön, Luan par Frida, Shangaï par Oslo,  jonque par drakkar, et nous voilà en Suède au Moyen-Âge. A peu près… Fermine aurait pu s’inspirer de Malraux à ce titre.

Un point m’a interpellé ; un dialogue entre un Irlandais et un Anglais : “Après quelques verres… les deux hommes se tutoyaient…” Je pensais qu’en anglais il n’y a jamais eu de distinction entre “tu” et “vous”… Me trompé-je ?

OPIUM – Maxence Fermine. Albin Michel – le livre de poche

Article publié par Noann le 2 mars 2010 dans la catégorie Cru bourgeois
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Dessin de Jordi Viusà. Conçu par Noann Lyne