Tu verras – Nicolas Fargues
Fils unique d’un père ignare, Clément vient de faire une chute mortelle dans une station de métro parisienne. Il aimait la musique branchée, de son âge, portait des jeans qui lui couvraient la moitié du slip, fréquentait la lie du collège, les copains de banlieue dont son père désespérait de la fréquentation, alimentait sa page facebook d’échanges idiots, usait et abusait de textos criblés de termes hachurés … de son temps.
Entre Clément et son père ce n’était pas tous les jours rose … Il y avait souvent des coups de gueule, des grandes leçons de morale à deux balles lancées telles des couperets : « Tu verras quand tu seras grand ».
Et tout est dit …
Mais Clément est mort … à 13 ans. C’est insensé. Mort juste avant de voir ce qu’est grandir, juste avant de se heurter à son père parce qu’il lui trottait en tête de devenir musulman … Mort avant de pouvoir séduire la fille dont il s’était entiché et pour laquelle il voulait mourir, se jeter sous un bus roulant vers lui pour lui prouver son amour …
S’ensuivent alors de dangereux questionnements … Aurait-il joué la scène du suicide dans sa tête avant le drame ?
L’auteur s’intéresse à cette mort programmée et scrute à travers une écriture subtile mais dérangeante les tréfonds de cette âme d’ado fragile.
La couverture du roman est blanche, immaculée, comme l’évocation d’une mort d’enfant. Blanche, aussi peut-être pour évacuer les pleurs du lecteur, le désespoir vers lequel le récit conduit celui-ci.
Cependant, bien que désespérant, ce récit n’attire jamais la compassion, curieusement. Peut-être parce l’on est plus porté par ce père qui cherche à comprendre le geste de son fils et se sent un peu coupable de n’avoir pas saisi le fléchissement de celui-ci vers l’abîme, le désastre, la fin …
Et l’auteur de terminer de manière inattendue cette descente en enfer d’un père qui échoue à Ouagadougou à la recherche d’un marabout qui l’aiderait à guérir de ses souffrances …
Fort, embrouillé parfois, troublant aussi.
Tu verras de Nicolas Fargues, Éditions P.O.L.