La vie en archives d’un Petit Gars – Jean-Louis Riguet
Voici le récit empreint de vécu, l’histoire de toute une vie particulière, celle d’un jeune garçon qui, dans les années 60, sans aucun bagage particulier, sans diplôme, va partir à la recherche d’un travail… Et gravir les marches une par une, jusqu’à devenir notaire.
Il n’est pourtant pas du tout destiné à cette profession. Ses parents sont plutôt pauvres, ouvriers dans le textile, ils gagnent leur vie chichement, ne font pas partie du monde des notables. Et pourtant, leur rejeton va faire une carrière remarquable. Cependant, il gardera toute sa vie ses racines. Il sera toujours celui qui n’est pas du “bon” milieu, qui n’est pas de la bonne souche. Cela ne l’empêchera pas malgré tout de creuser son chemin, à force d’assiduité et de travail. De simple larbin au début, il acquiert des responsabilités, se fait remarquer par de menues tâches. Il quitte son travail et en trouve un autre, plus valorisant, auprès d’un notaire qui le prend sou son aile protectrice… Et de fil en aiguille.
On eût pu craindre de ce récit, qui est tout de même auto-biographique, même si rien ne l’annonce clairement, qu’il ait les défauts liés à ce genre : l’auteur se fait plaisir en racontant ses mémoires, dans un style où le moi-je triomphe, sans trop se soucier de ses lecteurs, sans même s’apercevoir qu’il ratiocine. Mais ici, l’auteur évite adroitement ces écueils. Il parle à la troisième personne et sous un nom d’emprunt : François-Xavier, ou FXG. Ce qui donne une impression de décalage et de romancé. Choix judicieux, puisque nous voilà dans une sorte de roman à teneur biographique, au lieu d’un simple journal personnel.
L’ambiance du notariat est amplement décrite, sans être trop rébarbative (on aurait aimé peut-être moins de détails ou de longueurs concernant la fonction notariale). Mais aussi, il y a la vie de FXG, ses amours, ses trahisons, un épisode d’abus, ses vacances, qui sont racontées avec détails et anecdotes parfois savoureuses. Nous redécouvrons l’époque bénie des années 60 et 70. Ses difficultés aussi. Quand il fallait taper les actes à la machine à écrire doublée de carbone, et que la moindre faute nécessitait une réécriture complète du document. De la machine Rémington jusqu’au traitement de texte, en passant par l’époque hybride des machines à boule et des appareils avec un écran d’une seule ligne. De la copie carbone à la photocopieuse laser couleur. Toute une évolution dans laquelle l’auteur nous plonge. L’auteur évoque également la difficulté de l’auto-apprentissage, mais aussi sa force. L’écriture est classique et fluide. Cependant, j’ai relevé un certain nombre de fautes de frappe et d’orthographe. Aaaah, l’auteur-notaire a donc oublié l’époque ardue où la moindre erreur était sanctionnée ! Il s’en remet au correcteur automatique ! Misère, où est passée cette belle éducation rigoureuse ? Cependant le pdf qui m’a été transmis n’est peut-être pas le document définitif. J’imagine que l’éditeur aura corrigé, entre-temps…
“Par définition, François-Xavier estime que l’autodidacte apprend seul, c’est-à-dire mal, lentement. Il est en effet plus facile d’enregistrer n’importe quoi lorsque vous avez participé à une formation qui allie l’audio et le visuel complétés par l’écrit, que lorsque vous êtes confronté à un livre, si bien fait soit-il, car vous pouvez trouver la difficulté au détour d’une phrase, d’un mot, dont la signification n’est pas forcément la même pour le lecteur que pour l’auteur de l’ouvrage. Et vous butez longtemps, à ne pas comprendre, à chercher, à hésiter, à emmagasiner. Par contre, une fois cet enfantement effectué, c’est pour la vie.”
La vie en archives d’un Petit Gars de Jean-Louis Riguet