Le chien, la neige, un pied – Claudio Morandini
Adelmo Farandola vit dans la montagne italienne, isolé du monde et des tumultes. Dans sa thébaïde, il ne fréquente ni ne voit personne, hormis peut-être de temps à autre croise-t-il le garde-chasse mais il ne s’en souvient guère. Adelmo perd la mémoire depuis quelque temps. Et son univers se résume à peu de chose : se nourrir un peu, ranimer l’âtre de sa cheminée, juste de quoi vivre un peu. Et puis il y a ce chien qui surgit de nulle part un beau jour, le suit et devient son seul interlocuteur et ami d’infortune. Les saisons défilent inlassablement sans que quoi que ce soit ne change dans la vie du vieil homme.
Jusqu’à ce jour de printemps où le dégel fait place aux premiers balbutiements de la nature en éveil… Au creux d’un tapis de feuillage non loin du chalet, Adelmo fait une curieuse et morbide découverte. Un pied humain se trouve déposé là, sur le sol humide débarrassé de la neige qui s’en est allée doucement.
Et Adelmo se met à gamberger… Il essaie de se souvenir de ce qui s’est passé l’an dernier mais en vain. Sa mémoire lui joue des tours et il n’arrive pas à s’expliquer ce qui a bien pu se produire. Qui aurait bien pu déposer là-bas ce morceau d’humain ?
Avec une juste dose de suspense, l’auteur nous livre une fable au ton féroce qui désarçonne et nous tient en haleine jusqu’au bout. Le récit, certes succinct, au style aigrelet est lourd de messages tous percutants et nous parle de solitude, celle qui finit par rendre l’humain incapable de structures, de repaires, le met à plat jusqu’à devenir exsangue.
L’histoire est fascinante, jouxte même parfois l’épouvante mais à l’intérieur de la noirceur de ce conte, l’auteur injecte de petites touches poétiques qui donnent au récit une dimension onirique.
J’ai beaucoup aimé cet univers décalé et l’histoire m’a d’autant plus émue parce qu’elle me replonge dans le cadre montagneux de ma prime enfance…
Le chien, la neige, un pied de Claudio Morandini, éd. Anacharsis