Deux sœurs – David Foenkinos
« Pendant toute l’après-midi, Mathilde avait repensé à cette expression : nager dans le bonheur. Que se passe-t-il quand on atteint le rivage ? »
Mathilde a 30 ans et vit une belle histoire d’amour avec Étienne. Professeur de français dans un lycée, elle est férue de littérature et particulièrement de Flaubert et son roman « L’éducation sentimentale ». Une passion qu’elle partage avec ses élèves. Elle aime profondément son compagnon Étienne. Et lorsque celui-ci, lors d’un voyage en Croatie, lui demande sa main, Mathilde est plus heureuse et plus épanouie encore.
Quelque temps plus tard, Étienne se montre distant, embarrassé. Mathilde le bombarde de questions et il finit par avouer qu’il a croisé Iris, son ex-compagne, que ses retrouvailles l’ont bouleversé et que sa place est désormais auprès d’elle, la femme de sa vie. Le monde de Mathilde bascule alors. L’édifice solide qu’elle avait construit naguère s’effondre sous le choc des paroles d’Étienne qui s’abattent sur elle comme un couperet et des vents contraires qui s’acharnent contre elle. S’ensuivent alors la déprime, puis la faute professionnelle qui lui vaudra un licenciement, et enfin la perte de son appartement. Mathilde ne sait plus à quel saint se vouer pour retrouver un semblant d’équilibre. C’est alors que sa sœur Agathe vient à son secours et tente de la sortir d’une perdition certaine. Il était moins une car Mathilde dépérit et chancèle… Mais l’appartement d’Agathe est exigu et autour d’elle il y a Frédéric, son mari, et sa fille Lili. Et même si chacun y met du sien et de la bonne volonté, le petit logis d’Agathe devient une sorte de geôle imposée.
Comment survivre pour Mathilde dans ce huis clos suffocant ? Tour à tour, elle fait montre de en se remettant en question, sera même serviable et dévouée. Mais très rapidement la jeune femme deviendra agaçante, voire intruse. Le lecteur sera lui aussi pris au dépourvu, trouvant de prime abord la jeune sympathique et lui donnant mille excuses pour ses dérapages, nous gardons bien de la juger, l’estimant même piégée par un compagnon goujat et irrespectueux, la laissant à la dérive.
Ainsi l’on se désole de suivre Mathilde dans cette histoire de rupture inopinée, sans le moindre signe avant-coureur, mais moult réflexions foisonnent dans notre esprit, et l’on pardonne à Étienne d’avoir fléchi devant ce cœur oublié quelque temps et reconquis à présent, parce que tout simplement peut-être, vulnérable, il se sentait un peu trop prisonnier d’une histoire d’amour qui le retenait dans le chemin tout tracé qui ne lui correspondait pas…
Je me suis hâtée vers la librairie pour me procurer le dernier opus de David Foenkinos que j’apprécie pour sa plume souvent mouillée d’émotion et de sentiments. L’on connaît moins cette facette plus sombre de l’auteur. Ici, il dessine au vitriol le portrait d’une femme qui perd pied, elle qui coulait des jours heureux entre amour et travail, elle qui savourait la douce quiétude d’un bonheur ronronnant, la promesse d’un lendemain sans nuages. L’auteur nous plonge dans les arcanes de douleur et de désespérance.
L’auteur de l’excellent roman « La délicatesse » se fourvoie un peu dans cette histoire d’une banalité affligeante de rupture amoureuse comme il y en a des milliers…
Deux sœurs de David Foenkinos