Léger Carnage – Nicolas Crousse
Un garçon dans une famille matriarcale légèrement étroite d’esprit. Les sœurs, les tantes, la mère… et le père qui s’en va, bouté dehors comme un malpropre. Un garçon adulé, chéri à l’extrême par ce groupe bien pensant… à tel point qu’on lui donne un doux nom : “Ange”
Ange mène une vie tranquille. Adulte, c’est un homme de relations, qui met en valeur, présente, introduit des conférences. Il devient “modérateur”. Ce titre m’a rappelé la politique belge, ces ploucs qui ont pour mission de rabibocher les régions : réformateur, démineur, conciliateur, préformateur.
Ange fréquente le gratin, notables, ministres, stars. Tout le monde l’adore. C’en devient écœurant. Ange prend conscience de l’hypocrisie de ceux qui l’entourent, et de la sienne. Comment ne pas devenir hypocrite, quand il faut gagner l’estime des grands ? Mais c’en est trop. A 40 ans, il décide un grand chambardement. Ange va mourir. Lucien lui succèdera.
Sous le ton ironique se cache une satire sociale subtilement menée. Pas de grands éclats, mais de petites touches de peinture qui donnent un tableau dans des nuances de noir, qu’il faut savoir apprécier.
Récit intimiste, porté par la parole forte d’un auteur qui sait manier le sarcasme et qui s’exprime par l’esprit d’un personnage central. L’exercice n’est pas sans danger…Tout est porté par une narration à voix unique. Il n’y a pas de voix secondaire pour corriger le tir et donner un autre point de vue. Il faut donc que cette voix unique ne soit pas lassante, prétentieuse, moraliste, négative, pédante. Tous ces écueils, Nicolas Crousse les évite habilement. C’est légèrement cocasse, doucement critique. Il y a aussi, en filigrane, une réflexion sur les relations d’un homme avec son père.
Léger Carnage – Nicolas Crousse. Éditions du Somnambule Équivoque