La marche de Mina – Yôko Ogawa
Tomoko, douze ans, habite la campagne et vient de perdre son père. Elle passe alors une année chez son oncle dans une grande ville pendant que sa mère suit une formation professionnelle. Elle découvre là-bas un milieu très différent du sien. Son oncle est directeur d’une usine de soda, sa cousine, Mina est passionnée de littérature et va à l’école à dos d’hippopotame nain, et la grand-mère est allemande.
Tomoko, perdue depuis la mort de son père, trouve sa place dans cette maison et vit auprès de cette famille une année qu’elle n’oubliera jamais.
L’auteur délivre une sorte d’enseignement à travers ce roman. Tomoko s’en fait la messagère. Elle se laisse porter par cette nouvelle vie dans une sphère familiale remplie de secrets, et tout va petit à petit lui donner un envol différent, allant jusqu’à lui faire oublier tout ce qu’elle était. Dans cette nouvelle vision du monde de l’après-guerre, Tomoko ne sera plus la même.
Et puis il y Mina, sa cousine, qui collectionne les boîtes d’allumettes illustrées et évolue dans un microcosme de rêves et de fantaisie, se prend pour une princesse et ouvre la porte de son cœur à Tomoko. L’atmosphère qui règne dans la maison invite à la tendresse et à la chaleur humaine.
Et voici que le lecteur évite le bruissement des pages qu’il tourne pour ne pas trahir la quiétude et la douceur qui émanent du récit.
L’écriture est délicate, sensible, sereine, à l’instar de la culture japonaise. Les personnages sont tendres, touchants et nostalgiques, sans qu’il émane jamais d’eux inquiétude ou mystère. Le récit coule doucement tel un ru entre le feuillage, ce qui donne l’impression de longueur parfois mais les mots sont comme des murmures qui viennent à l’oreille sans bousculer. C’est là sans doute que naît le talent de l’auteur. Tout est suggestif, paisible mais plein de vérité.
Un roman baigné de poésie qui évoque le mélange de cultures de ce Japon des années 70, riche, spirituel.
A découvrir sans tarder … si ce n’est déjà fait.
“Même si un livre ouvert était retourné sur la table du solarium, Madame Yoneda ne prenait jamais sur elle de le ranger. De l’autre côté des pages, se dissimulait un monde inconnu, et le livre retourné en constituait la porte d’entrée, si bien qu’elle ne pouvait pas le manipuler à tort et à travers. Afin que Mina ne s’égare pas.”
La marche de Mina par Yôko Ogawa, Actes Sud/ Babel.