Grand vin

Les oliviers du Négus – Laurent Gaudé

Un recueil de quatre textes, qui ont pour thème l’Italie, les rapports de quelques personnes avec la guerre, la mort, la société…

Zio Négus est mort. Toute une affaire ! Mais qui était cet homme finissant, méprisé par son village ? Il vivait en ermite dans une abbaye désaffectée et parlait avec fièvre de Frédéric II, empereur du XIIIième siècle.  Il le revoyait luttant, reclus dans une église en siège. La porte a tenu bon, disait-il.. Pourquoi tant d’exaltation a propos de ce roi disparu ?Couverture Les oliviers du Négus

Un centurion s’avance vers un bastion aux confins de l’empire romain. D’un coup de poignard, il assassine Caïus, le centurion déchu qui avait gardé le fort pendant trois ans. Mais Caïus tenait sur lui un parchemin qui disait : “celui qui viendra je le reconnaitrai… Ce sera mon fils”. Le centurion bascule. Ce message  lui était destiné. Il prend peur et décide de partir en mission avec quelques hommes.

Le “Golem” est une créature conçue par le terre même, pour se venger de l’homme. En 14-18, la terre, bafouée, torpillée, ramasse ses forces et crée un démon argileux. Les hommes décapitent ce monstre et l’enferment dans des caisses en bois. Mais il renait de ses mottes ! Le texte de Gaudé sonne comme un avertissement aux hommes qui méprisent la nature.

L’assassinat du juge Falcone en 1992, revisité. Il est devenu un symbole public de la lutte contre la mafia, après avoir péri sur une autoroute truffée de 400 kilos d’explosifs ! Ce texte reconstruit les pensées du juge Borsellino, qui se savait condamné. La mort de son homologue était un signe. Il avait raison. Lui aussi explosera, quelques mois plus tard.

Mon avis : Laurent Gaudé, conforme à ses habitudes, dessine des personnages sombres dans un abîme de noirceur, mais dans cette noirceur il y a une infinité de nuances. C’est tragique, dur, impitoyable, mais c’est la vie dans toute son obscure nudité. Ces quatre textes susciteront je pense diverses réactions opposées. Des œuvres complexes, d’une grande portée, habillées par cet auteur qui est décidément un écrivain, une sorte de Hitchcock de la littérature française. On adore ou on déteste, mais c’est toujours aussi singulier, et d’une puissance émotive rare. C’est tout en excès, aussi.

“Nous sommes partis au matin. Le ciel était si bas qu’il n’y avait plus d’heure. Tout était nappé de silence, comme si les dieux avaient décidé de retirer les bruits du monde. Les oiseaux s’étaient tus, les sabots ne faisaient plus aucun son en martelant le sol., pas un souffle de vent ne venait secouer les feuilles des arbres. Il y avait tant d’humidité dans l’air que nos capes et nos fourrures étaient gorgées d’eau. J’ai avancé, d’un pas lent, avec un étrange mélange d’inquiétude et de ravissement : pour la première fois de ma vie, je marchais en dehors de l’Empire.”

Les oliviers du Négus de Laurent Gaudé. Actes sud

Date de parution : 01/05/2011  
Article publié par Noann le 22 mai 2011 dans la catégorie Grand vin

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