La fin des temps – Haruki Murakami
Un informaticien talentueux mène une vie dissolue dans des lieux de perdition imbibés d’alcool, se gave d’amours éphémères, de bonne chair et de musique jusqu’au jour où un vieux savant reclus dans les sous-sols d’un immeuble, inventeur d’un programme informatique de grande envergure va l’inviter à collaborer étroitement afin de troubler ce programme…
Le héros va connaître alors une aventure inattendue … Il se retrouve plongé dans des abîmes hantés de licornes et autres créatures à la fois merveilleuses et effrayantes, une sorte d’univers dénué de sentiments, sans plaisir ni tristesse. Un lieu au parfum de fin du monde où fantasmes et vérité se mêlent. Et la mission de ce héros déluré sera de sonder les crânes des créatures et leur subconscient pour détecter ce que révèlent les os et les chairs de nos cerveaux.
Dans ces profondeurs abyssales, le héros a l’âme en plein chaos, lui faisant imaginer que les deux univers peuvent coexister et s’accorder en harmonie.
Le récit foisonne de références philosophiques et côtoie un univers fantastique qui happe d’emblée le lecteur et le transporte longtemps encore lorsque sonne le mot de la fin.
L’auteur nous invite à le suivre dans un dédale d’émotions qui font frissonner et nous accueille dans un univers mystérieux et surnaturel. L’auteur ne se borne pas à nous faire voyager dans un récit au bord de la science fiction mais il parle du Japon de la fin des années 80 et nous donne une belle réflexion sur la difficulté de se situer, d’être soi dans un monde gorgé de superficialité, dénué de valeurs et d’émotion. Il nous parle du quotidien, de la vie de son Japon natal mais aussi d’un ailleurs où tout bascule, où tout n’est que qu’une lente descente vers la paix intérieure, la mort aussi…
Science et fantastique embrasent les paragraphes de ce récit grandiose. On croise çà et là des êtres extraordinaires se heurtant à la vérité et au rationnel mais jamais le lecteur n’est gêné de cette bousculade d’un monde à l’autre et se laisse porter aux antipodes sans rebrousser chemin.
Le roman est saisissant par sa profondeur et le style de l’auteur, tout en légèreté et en finesse nous désarme mais l’on se sent guidé aussi, se retrouvant comme un funambule en équilibre au-dessus de deux entités.
Les chapitres se succèdent, intenses, et l’on ne sort pas indemne de cette balade entre deux mondes parallèles. Ainsi, le cœur tressaute et frémit de soubresauts émotionnels. Un livre à vivre plutôt qu’à lire, une leçon de vie magistralement couché sur le papier.
Robuste et délicat à la fois, un roman que j’ai cloisonné dans mon âme et dont je porterai les stigmates longtemps encore…
La fin des temps de Haruki Murakami, Edition Collector Poche