Un hiver à Paris – Jean-Philippe Blondel
Alors qu’il rentre de vacances, Victor, écrivain et professeur de lettres, reçoit une missive qui lui remémore son passé de lycéen provincial, arrivé à Paris pour y suivre les classes préparatoires d’un lycée prestigieux. Et il se souvient de ces années de galère dans un monde redoutable, sans foi ni loi. Jamais il n’a pu oublier cette époque douloureuse, insupportable et les coups de coude qu’il a dû donner au destin pour s’en sortir à tout prix.
Sa mémoire se recueille et les souvenirs virevoltent dans un balai infernal. Il se rappelle les mois qui se suivaient, les retours réguliers chez ses parents avec qui il n’a plus grand-chose à partager, puis l’éloignement qui pèse de plus en plus lourd, le vide enfin.
Victor se souvient…
Élevé brillant, ce garçon de province issu de parents dénués de culture était parvenu à intégrer les classes préparatoires d’un lycée élitiste de Paris. Il découvrit un monde cruel, monstrueux, où se côtoyaient avilissement, dégradation et irrespect. Dans ce chemin jalonné d’écueils, Victor a eu du mal à trouver ses repères. Ainsi les copains le trouvaient mal sapé et il faisait régulièrement l’objet de railleries, tandis que les profs le considéraient comme médiocre, ne croyaient pas en lui. Alors qu’il avait le moral en berne, le suicide de Mathieu, son unique copain de classe, provincial comme lui, allait lui révéler une certaine notoriété, de laquelle il n’hésitera pas à profiter. Il fera la connaissance des parents de son ami décédé et suivront de belles rencontres, toutes imprégnées de tendresse, qui transformeront son destin…
L’auteur donne ici toute la mesure de son talent pour approcher sans emphase des situations graves, des atmosphères pesantes dans une société où règnent le mépris et l’irrespect. Les sentiments sont effleurés avec délicatesse et suavité, qu’ils soient tendres ou plus empreints de dureté. Il s’immisce avec beaucoup de finesse dans l’âme des bourgeois parisiens qu’il a connus pendant ses études, décrit à merveille le regard de ces professeurs des grandes écoles peu soucieux d’élèves venant de Province, de ceux qu’ils considèrent comme des gens de peu. Il dépeint avec méticulosité un pan d’une société bourgeoise hautaine et arrogante, qui fait fi de la bienséance et du respect.
L’auteur se repasse le scénario de ses années d’études à Paris, vingt ans plus tôt, dans un lycée réputé, censé aider, voire rendre possible de se hisser au faîte d’un monde intellectuel élitiste.
L’écriture est ponctuée d’émotion et de délicatesse, les personnages magnifiquement décrits dans leurs faiblesses, leur combat pour survivre au sein d’une communauté qui ne fait pas de cadeau et vous traine dans la boue parce que vous n’êtes pas bien nés, pas citadin, ou aux antipodes de ce que ces gens-là appellent la bonne éducation.
La mélopée de l’auteur émeut et touche en plein cœur…
Un hiver à Paris de Jean-Philippe Blondel, éd. Buchet-Chastel