«Sous certaines latitudes, pendant un certain laps de temps à l’approche et au lendemain du solstice d’été, quelques semaines en tout, les crépuscules rallongent et bleuissent».
L’auteur, terrassée par la mort de son époux d’abord et ensuite de sa fille adoptive nous livre ses douleurs à travers deux romans poignants… Je n’ai hélas pas lu le premier.
Le bleu de la nuit est un témoignage en sourdine, une sorte de sépulture de mots bâtie pour inviter à la méditation, la prière. Avancer coûte que coûte, éviter de se laisser aspirer vers le vide, la désespérance, se laisser porter par l’écriture pour que les mots se transforment en étoiles, rechercher dans ce ciel désolé un liseré d’azur, tel est le cheminement de la pensée de l’auteur.
Le lecteur est ému par ce requiem qui résonne en écho dans le cœur comme un chant d’espoir. Jamais il n’est question de fléchir ni de larmoyer puisque l’auteur approche la mort avec pudeur et nous dit les blessures de son âme avec grâce, sans jamais implorer la compassion. L’émotion et la sensibilité sont omniprésentes tandis qu’elle affronte avec subtilité l’injustice de la perte d’un enfant, sa fille chérie, en se fixant comme seul objectif de contempler le ciel pour la voir revivre fût-ce un instant.
Et tandis que la nuit étreint le jour, l’auteur se livre à la médiation et se laisse doucement guider par cette lumière bleutée y trouvant un repère, l’essentiel message qu’elle garde cloisonné dans son cœur et sa mémoire.
Le récit d’une vie déchirée, donné avec sincérité et force mais qui ressemble parfois à une chronique d’ombre et de lumière. L’écriture est spontanée, juste, rythmée. De chaque page émanent des senteurs de fleurs délicates mais aussi de bois mort.
Le roman est jalonné d’événements tous aussi graves les uns que les autres. L’auteur aborde tout de go le thème de la vieillesse dont elle redoute les effets désastreux, l’adoption, la maladie et la mort.
Avec finesse et témérité, elle fait le compte à rebours de ses souvenirs, se remémore les bonheurs d’antan et elle fait fi de cette mort qui la guette et l’attend au détour du chemin.
Belle et si triste pourtant que cette immixtion dans une mémoire détruite au marteau-piqueur…
Le bleu de la nuit de Joan Didion, éditions Grasset
Date de parution : 09/01/2013
Article publié par Catherine le 18 juillet 2013 dans la catégorie
Grand vin
« Et puis il y avait ces rêves éveillés qu’elle faisait… Mais ceux-là, au moins, elle pouvait les chasser. C’était pire la nuit. Il ne s’agissait pas de cauchemars, bien au contraire, mais ces rêves-là la troublaient pourtant profondément. Chaque nuit, elle se réveillait en nage, fébrile, incapable de réfréner l’ondulation lascive de ses hanches, le drap roulé en boule et serré entre ses cuisses. Tout cela semblait si… réel. Comme s’il s’était vraiment trouvé là. Trempée de sueur, elle avait l’impression de sentir les baisers virils sur ses joues. Elle se demandait d’où lui venaient ces rêves, mais fuyait la réponse. Ce n’était pas le moment de se laisser emporter par le désir. La seule évocation du mot la fit rougir, avant qu’elle ne le refoule au plus profond de son subconscient. »
Rosemary Hall est une artiste peintre pleine de candeur… En esquissant les contours de son modèle masculin avec volupté, elle s’éprend de lui ardemment. Mais ce désir en sourdine aboutira bientôt à une quête démesurée de l’assouvissement de pulsions réfrénées depuis trop longtemps. Ainsi, le beau Dorian va se laisser conquérir par Rosemary et lui faire découvrir le sexe débridé dans toutes ses formes.
Parallèlement, Rosemary fréquente la sulfureuse Helen Wotton, qui observe d’un œil averti le bellâtre que son amie caresse de son pinceau sur la toile et s’intéresse à lui de très près jusqu’à devenir son amante.
Mais sous leurs arcanes, ils se découvrent et s’accrochent et les deux univers se rejoindront bientôt pour aller toujours plus loin, toujours plus haut.
Tandis qu’Oscar Wilde nous faisait découvrir jadis le portrait du très beau et sensuel Dorian Gray, un homme à l’âme noire, débauché, à l’appétit charnel développé, nous voici bien loin de la prose hardie de cet auteur lu naguère par des milliers d’entre nous, bousculant les règles de moralité, prêchant en faveur de l’épicurisme, livrant un conte mettant en scène deux homosexuels, nous découvrons ici, à travers une écriture légère, un récit qui, à défaut d’être un parangon d’érotisme, sombre rapidement dans la monotonie, le cabotinage, voire la vulgarité…
Pourtant fervente de romans érotiques, j’ai précipité ma lecture de ce roman-ci, n’y trouvant par ci par là que quelques passages intéressants. Les personnages ne m’ont pas émue, excepté peut-être qu’en lisant entre les lignes de son âme démoniaque, le libidineux Dorian cache des sentiments amoureux plus vrais, plus naturels qui parfois transparaissent doucement.
Les scènes de sexe eussent pu être moins banales, décrites de façon plus alléchantes, plus émoustillantes mais elles sont livrées dans un style lourdaud et finissent par lasser à défaut de l’effet contraire, mettre en haleine et en émoi.
De même, les leçons de sensualité prodiguées par le beau Dorian à Rosemary tournent rapidement au ridicule et ne donnent pas une puissance exceptionnelle à l’érotisme de ce récit.
Un roman à lire sur la plage entre deux baignades et se hâter vers le mot fin, le refermer et l’oublier… S’intéresser plutôt au regard de braise que vous lance l’Adonis, alangui sur la serviette qui côtoie la vôtre, la peau dorée par les douces caresses d’Hélios, pour se laisser guider vers l’univers d’Eros…
Bon, là je me suis lâchée un peu car mon esprit est en vacances…
Ce roman fut un intermède ludique avant d’entamer d’autres lectures plus sérieuses et par là même de nouvelles chroniques plus intéressantes.
Après moult réflexions, j’ai attribué un verre à ce récit dans notre classement, parce qu’il a le mérite d’être simplement distrayant…
Dorian Gray – Le portrait interdit d’Oscar Wilde & Nicole Audrey Spector, Pôle Roman
Date de parution : 02/07/2013
Article publié par Catherine le 4 juillet 2013 dans la catégorie
vin de table
Présentation :
Derrière la Thaïlande du sourire, des plages et des massages, il existe une Thaïlande noire, violente, où la drogue est répandue et l’emprisonnement aisé. La corruption y est reine et les tensions religieuses embrasent des régions entières. Dans ces provinces, l’armée a pour mission d’étouffer la montée d’un islam jugé inférieur par les dirigeants majoritairement bouddhistes, une mission qui, en quelques années, a causé des milliers de morts… Le narrateur de ce roman, un Français, vit à Bangkok où il dirige une société de retouches photographiques. Chaque jour, il manipule des photos publicitaires mais également politiques, donc sensibles. Alors qu’il se retrouve plongé, en raison de son métier, dans la violence du pays, un drame intime, survenu pendant son enfance, resurgit vingt ans après et mêle une vengeance personnelle à la noirceur de Bangkok. Un grand roman, furieux et captivant, qui s’éloigne des cartes postales pour mieux sonder les mensonges d’un pays et nous entraîner sur les chemins détournés de la vérité.
Mon avis :
Eh bien ceux qui pensent que la Thaïlande est un pays de rêve vont découvrir l’envers du décor ! Corruption, racket, magouilles politiques, guerre entre la police et les militaires. Les combats de boxe, Bangkok « côté cour », l’argent, la torture, les terroristes, la prostitution, les attentats, l’intérêt des militaires à attiser la terreur, les inondations, les « petits arrangements » et le travestissement des preuves, l’obligation de vénérer le roi et la réalité du crime de lèse-majesté, la prison.. Le tout sur fonds de pays de refuge… de recherche de vérité, de vengeance, de mensonges et de folie et de stupre…
Ce roman se lit comme un polar. On ne s’ennuie pas un seul instant. L’écriture est fluide et rythmée. On voyage en marge de la Thaïlande des catalogues de vacances… Dans un pays ou les Thaïlandais et les Farangs se côtoient. Les digues sautent… mais pas uniquement sous la poussée des eaux. Un roman percutant, puissant, actuel, dérangeant, sans complaisance…
p. 144 : Kalataesa. Connaître sa place. Un des préceptes les plus importants de la société thaïlandaise : savoir où l’on est, soi, en tant qu’individu doté de limites nettes, mais surtout connaître sa place par rapport aux autres. Le corps social comme une immense pieuvre formée par les millions de consciences individuelles, les millions de réponses instinctives à la question de la « place ».
La nuit pacifique de Pierre Stasse. Éditions Flammarion
Date de parution : 02/01/2013
Article publié par Yves Rogne le 4 juillet 2013 dans la catégorie
Cru bourgeois
Présentation de l’éditeur :
Défendre cette femme… Effacer les clichés qui la défigurent. Briser le masque que le mépris a scellé sur son visage. Aimer cette femme dont tant d’hommes n’ont su que convoiter le corps et envier le pouvoir. C’est cette passion qui anime le cinéaste russe Oleg Erdmann, désireux de sonder le mystère de la Grande Catherine. Qui était-elle ? Une cruelle Messaline russo-allemande aux penchants nymphomanes ? Une tsarine clamant son “âme républicaine” ? La séductrice des philosophes, familière de Voltaire et Diderot, Cagliostro et Casanova ? Derrière ce portrait, Erdmann découvre le drame intime de Catherine – depuis son premier amour brisé par les intérêts dynastiques jusqu’au voyage secret qui devait la mener au-delà de la comédie atroce de l’Histoire. L’art de ce grand roman transcende la biographie. L’effervescence du XVIIIe siècle européen se trouve confrontée à la violente vitalité de la Russie moderne. La quête d’Erdmann révèle ainsi la véritable liberté d’être et d’aimer.
Mon avis :
Alors pas emballée par le livre moi qui aime beaucoup Makine en général. Oleg, jeune cinéaste russe d’origine allemande désire écrire un scénario sur Catherine de Russie, qui a les mêmes origines que lui. Il va explorer le monde de ses amants, chercher à savoir si une fois au moins un homme l’a aimée. Le livre est un va et vient entre l’époque de Catherine et les années 80, années où il écrit puis tourne son film. Il soulève le problème de la censure, de la politique. Je trouve le livre brouillon. Plusieurs sujets évoqués qui pourraient être intéressants. Je ne suis pas entrée dans l’histoire, je n’ai pas fait connaissance avec les personnages.. Oleg vit plusieurs histoires, Catherine aussi… mais c’est lent… Un aspect intéressant : la transformation radicale de la société dans les années 80 avec le changement à la tête de l’État qui bouleverse totalement l’industrie du cinéma (entre autres choses) . Par contre un livre trop sexe et violence pour moi, avec peu de touches poétiques, même si les références au passé et la nostalgie sont présents par moments.
Extraits et Citations:
p. 216 « Les gens achètent maintenant surtout de belles reliures, explique-t-elle. Pour le plaisir des murs… »
Une femme aimée – Andreï Makine. Éditions du Seuil
Date de parution : 03/01/2013
Article publié par Yves Rogne le 24 juin 2013 dans la catégorie
Cru bourgeois
C’est l’histoire d’un amour impossible, a priori. Elle est danseuse. Lui, un homme d’affaire à qui tout réussit, ou presque. Elle conçoit avec difficulté qu’il puisse l’aimer pour ce qu’elle est. Clara n’a rien à lui offrir, croit-elle, imaginant que son dessin à lui, Gabriel, se borne à jouer au séducteur et à la désirer le temps de quelque aventure. Mais il l’aime comme dans les films, avec une grande sincérité qui finit par l’emporter… Reste à vaincre la résistance farouche de ses parents à lui, qui ne veulent que ce qu’ils croient le meilleur pour leur fils. Ils ne le voient que marié à une femme d’envergure sans doute. Ce début rappelle un film culte des années ’70, avec love dans le titre. Rien de bien neuf a priori. Mais bien évidemment, un drame va bouleverser la vie de nos tendres tourtereaux….
Parallèlement, Alexandre vit une existence tumultueuse et bien moins rangée que Gabriel. De mensonge en perversion, il s’est laissé allé aux mirages de l’infidélité, il a déçu tout l’univers, ses associés, sa femme, sa fille, et même son amante. Sa vie atteint un point de rupture… Quand un beau soir, il a un accident.
Les deux couples sont réunis par le destin. La Providence leur joue un tour pendable. Pour retrouver Clara, qui meurt de chagrin dans un hôpital, Gabriel devra accepter l’ironie du sort inattendue et cocasse. Mais en dire plus serait trahir cette intrigue ouvragée…
Pour son énième roman, Thierry Cohen renoue avec les secrets qui ont fait sa réussite : une grande romance, des beaux sentiments confrontés à de moins nobles, un peu de magie, du surnaturel, et des personnages meurtris au plus profond de leur âme, et qui n’en finissent pas de battre leur coulpe. L’histoire dégage de grandes émotions, et même si la romance et la magie sont poussés à bout de force, on se laissera porter par cette petite saga qui défie les lois de la réalité et de la pesanteur. Si l’histoire ne présente rien de bien particulier dans son premier tiers, si ce n’est une Love Story à peine améliorée, la suite est rocambolesque et nous offre un grand spectacle amoureux, qui fera chavirer le cœur des lycéennes, mais aussi de toute personne sensible à cet univers tissé d’irrationnel. L’écriture est sobre, facile à lire, sans trop d’effets, les pages se tournent toutes seules. Mais à mon avis personnel, on eût pu entrer plus tôt dans l’intrigue qui tarde un peu à prendre consistance et ne se développe pleinement qu’à mi-parcours (d’où mon billet tardif. Longtemps il est resté sur ma table de chevet, sans que je me résolusse à progresser, jusqu’à ce que le surnaturel m’emporte). Par la suite, les rebondissements se succèdent, pour qu’enfin la vérité et la candeur soient réhabilitées, comme il se doit dans tout bon roman. Les personnages sont attachants dans leur amour et leur infinie miséricorde… Thierry Cohen nous offre un bon grand roman populaire, où tous les ingrédients sont réunis !
Si un jour la vie t’arrache à moi – Thierry Cohen
Date de parution : 02/05/2013
Article publié par Noann le 17 juin 2013 dans la catégorie
Grand vin
Dans la réserve de chasse isolée, au cœur d’un Mozambique dévasté par les guerres, le monde de Mwanito, l’accordeur de silences, né pour se taire, va voler en éclats avec l’arrivée d’une femme inconnue qui mettra Silvestre, le maître de ce monde désolé, en face de sa culpabilité.
Mia Couto, admirateur du Brésilien Guimarães Rosa, tire de la langue du Mozambique, belle, tragique, drôle, énigmatique, tout son pouvoir de création d’un univers littéraire plein d’invention, de poésie et d’ironie.
Mon avis :
Alors ceux qui ont trouvé que je m’enflammais pour le livre « Poisons de Dieu, remèdes du Diable »du même auteur n’ont encore rien vu. Là, je suis dithyrambique. Ce livre est une splendeur, un bijou. Et extrêmement bien traduit. Silvestre a perdu sa femme ; il part s’enterrer au milieu de nulle part avec ses deux fils à qui il interdit tout contact avec le monde. Voyage intérieur des deux fils qui rêvent de voyager à l’extérieur de la prison paternelle. Parallèlement, l’histoire d’une jeune femme portugaise qui vient au Mozambique pour retrouver son mari disparu, envouté par l’Afrique et dont l’histoire croisera ce père et ses fils. On est au pays de la « saudade », du silence, du non-dit, de la tyrannie, du déni d’espoir. Livre de contrastes, de descriptions somptueuses.. Mia Couto enchante à tous les niveaux, à la fois peintre, poète et écrivain de l’âme et de l’Afrique…
Extraits :
p.17 “Je suis né pour me taire. C’est mon unique vocation. C’est mon père qui m’a expliqué : j’ai un don pour ne pas parler, un talent pour épurer les silences. J’écris bien, silences, au pluriel. Oui, car il n’est pas de silence unique. Et chaque silence est une musique à l’état de gestation.”
p. 124 « Éblouir, comme le mot l’implique, devrait aveugler, ôter la lumière. Et finalement j’aspirais maintenant à un obscurcissement. Je le savais, cette hallucination que j’avais éprouvée une fois rendait dépendante comme la morphine. L’amour est une morphine. On pourrait le commercialiser sous vide sous le nom Amorphine. »
L’accordeur de silences de Mia Couto. Éditions Métailié
Date de parution : 01/08/2011
Article publié par Yves Rogne le 17 juin 2013 dans la catégorie
Premier Grand Cru Classé
Éprise d’un homme ombrageux à la sexualité débridée, Rachel va se plier à tous ses caprices et subira un cortège de sauvageries la menant crescendo jusqu’au point de non-retour, l’inacceptable.
Ainsi, elle obéira aux désirs de Maxence la conviant à une sorte de messe noire érotique où, sous ses ordres, elle devra se donner sur une table de sacrifice. Elle accepte d’être l’héroïne de ce théâtre de sexe et de sang… jusqu’au drame.
Après une tentative de suicide, Rachel se retrouve enfermée plusieurs mois en clinique psychiatrique… Que s’est-il bien passé dans la vie de Rachel pour qu’elle en arrive là ?
Dans cet univers aseptisé, Rachel tente de reconstruire le puzzle qu’a été sa vie jusqu’ores. Elle médite et se remémore cet abysse périlleux et inquiétant dans lequel elle avait plongé les yeux fermés, se donnant tout entière, brûlant son âme pour un amant fou à lier. Au gré de ses notes, réflexions, Rachel renaît et s’éloigne de plus en plus de son état de victime, allant même jusqu’à se dire responsable de tout ce qui lui est arrivé, par amour, par passion, par faiblesse… Car oui, elle a aimé son amant à la folie et lui a tout donné. Mais, de toutes ses expériences, elle reconnaît à présent que rien n’est plus fort que l’écriture et la médiation pour avancer à tout prix, la tête haute et l’âme vidée de souvenirs macabres.
Pour un premier roman, l’auteur exploite une thématique difficile et l’on a d’emblée envie de refermer le livre très vite, craignant une sempiternelle histoire de descente vers un abîme dont on ne revient que plus meurtri encore… ou jamais.
L’on suit cette femme en perdition que l’auteur va élever sur le piédestal de la souffrance et l’ériger en martyre sexuel. Cependant Olivia Polizi ne se borne pas à parler de Rachel exclusivement mais se livre à un véritable examen de l’âme de ses personnages. Certes, le récit dit toute la souffrance qu’une femme peut parfois endurer et le mépris dont elle fait souvent l’objet depuis l’enfance. Mais ici elle nous dit aussi que dans ce monde ambigu où l’entraîne son amant, tant l’homme que la femme se laissent dériver vers l’insensé, en toute connaissance de cause…
Elle va même plus loin dans son raisonnement jusqu’à analyser de fond en comble l’âme et ses dégâts rendant fébrile, capable d’actes dénués de la moindre raison.
L’écriture est intense, ardente. L’auteur nous parle tour à tour de la cruauté subie depuis l’enfance mais aussi de la détermination d’éloigner le regard malfaisant des autres, de chasser la violence pour que l’horizon s’éclaircisse enfin plus tard…
Me voici dubitative quant au classement de ce roman sur notre site… Je lui donnerais trois verres pour l’écriture – magistrale – mais la thématique m’embarrasse un peu. Elle est certes magnifiquement exploitée et l’auteur va très loin dans l’analyse des âmes de ses personnages, hommes ou femmes confondus, mais j’ai ressenti parfois un malaise… inexplicable.
J’ai tranché et lui donnerai donc deux verres…
Notes (très) personnelles :
Je sais que beaucoup d’entre vous n’abonderont peut-être pas dans mon sens et je m’apprête à recevoir les foudres de la gent féminine, ou plutôt féministe… Pour ma part, je ne m’apitoierai pas seulement sur le sort de Rachel et sa souffrance, certes intense, mais m’intéresserai plutôt à Maxence, un homme qui porte une fois encore un masque de monstre et une âme de diable.
Je me demande pourquoi cet amant débauché en arrive à tant de dérives… N’est-ce pas aussi une souffrance larvée issue de l’enfance qui surgit à l’âge adulte ?
Nulle n’est contrainte d’aller jusqu’à la destruction de soi mais plutôt faut-il se poser une question fondamentale : jusqu’où est-on capable d’aller par amour ? Et s’il y a de l’amour, il n’y a pas de tabou, juste des délires qui s’entrechoquent entre deux êtres tout en souffrance…
Quelques mots venant tout droit de mon cœur…
Les Exigences de Olivia Profizi, éditions Actes Sud
Date de parution : 03/04/2013
Article publié par Catherine le 13 juin 2013 dans la catégorie
Cru bourgeois
Résumé de l’éditeur :
Erlendur revient ! Parti en vacances sur les terres de son enfance dans les régions sauvages des fjords de l’est, le commissaire est hanté par le passé. Le sien et celui des affaires restées sans réponse. Dans cette région, bien des années auparavant, se sont déroulés des événements sinistres. Un groupe de soldats anglais s’est perdu dans ces montagnes pendant une tempête. Certains ont réussi à regagner la ville, d’autres pas. Cette même nuit, au même endroit, une jeune femme a disparu et n’a jamais été retrouvée. Cette histoire excite la curiosité d’Erlendur, qui va fouiller le passé pour trouver coûte que coûte ce qui est arrivé…C’est un commissaire au mieux de sa forme que nous retrouvons ici !
Mon avis :
Erlendur avait disparu lors des dernières enquêtes en terre islandaise. Il est “le personnage” du roman: à la recherche de son passé. Il avait toujours été obsédé par les disparitions inexpliquées en montagne et en particulier par celle de son petit frère lors d’une tempête alors qu’il était enfant. En vacances sur les lieux de son enfance il va remonter le temps, rencontrer des personnages qui vivent depuis toujours dans cette nature sauvage et inhospitalière, et va se mettre à enquêter sur une disparition qui au fil du récit, semblera de moins en moins due à une tempête. Il va s’attacher à faire revivre le passé. Les personnages taciturnes vont parler, puis à force de recoupements, la vérité va se dessiner. Tout en subtilité, un roman gris/noir, une ode à l’amour teinté de mélancolie. Un roman sur les non-dits, les mensonges, la culpabilité, le remords, les fantômes du passé qui hantent la vie et les nuits, l’enfer de la dissimulation. Désolation des paysages, des êtres… et apaisement. Un roman humain. Pour moi le meilleur de sa série.
Étranges Rivages – Arnaldur Indriðason. Éditions Métailié
Date de parution : 07/02/2013
Article publié par Yves Rogne le 12 juin 2013 dans la catégorie
Grand vin