Cru bourgeois

L’amour sans le faire – Serge Joncour

Franck a coupé les ponts avec ses parents depuis dix ans… Un peu lassé de sa vie à Paris, il n’a qu’un désir, celui de retourner là-bas dans le Lot et d’y retrouver ses parents. Culpabilité ? Remords ? Il les appelle donc et un petit garçon décroche le téléphone. Il s’appelle Alexandre, comme son frère disparu voici dix ans. Curieuse coïncidence ou simple hasard ? Franck se rend donc aux Bertranges, la ferme où vivent ses parents. Tout a changé, l’atmosphère, le décor, ses parents même sont différents, un peu comme des figurants croisés au milieu d’une foule d’inconnus…

Alors qu’il retrouve ses parents, Franck croise Louise, veuve de feu son frère Alexandre disparu accidentellement et son fils Alexandre, un petit bonhomme de cinq ans, confié à ses grands-parents durant quelques jours.

Entre Louise et Franck le climat est d’abord tendu et étouffant. Mais leurs blessures et leurs tourments finissent par les rapprocher. Louise est peu prolixe mais elle fait montre de beaucoup de compréhension et ses silences et ses regards deviennent éloquents.L'amour sans le faire

Franck veut en savoir plus de toutes ces années sans le moindre signe de vie de ses parents. Louise devient son refuge, son repère, car elle l’aide à reconstruire un peu les liens défaits, à aimer ceux qu’il a dénigrés, à renaître un peu lui-même aussi.

Au fil des jours, il va disséquer les faiblesses de chacun, essayer de les comprendre et, avec l’aide de Louise, tentera de lever les non-dits et les rancœurs qui envahissent sa mémoire.

Le talent de Serge Joncour et sa plume incontestablement belle sauvent de justesse cette sempiternelle histoire de famille fracassée par le deuil et les secrets pesants. L’auteur pose les questions fondamentales : peut-on rebâtir une forteresse si celle-ci est en ruine ? Peut-on faire renaître de ses cendres l’amour que les années d’absence ont un peu éteint ?

Une écriture simple et fluide, un récit empreint de justesse, sans fard ni fausses notes. Indubitablement… Amour et tendresse se côtoient çà et là tandis que les sentiments de culpabilité et l’amertume surgissent bientôt.

Certes, l’auteur livre un récit élégant, voire miséricordieux. Il sonde la vie et le passé de cette famille fissurée tantôt par la mort d’un fils, tantôt par l’absence de l’autre, mais personnellement je n’ai pas été conquise par cette histoire comme il y en a pléthore.

Les auteurs sont-ils à court d’inspiration pour s’attarder à ce point aux blessures du passé, à mettre en exergue les souffrances familiales ? Ont-ils l’humeur triste et maussade pour sonder les âmes au marteau-piqueur ? Amertume ou règlements de compte ?

Un bon roman, certes, mais un sujet approché mille fois…

L’amour sans le faire de Serge Joncour, éditions Flammarion

Date de parution : 22/08/2012  
Article publié par Catherine le 16 septembre 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

Aimer (quand même) le XXIe siècle – Jean-Louis Servan-Schreiber

L’auteur :

Jean-Louis Servan-Schreiber est essayiste et journaliste. Observateur attentif de notre rapport compliqué au temps, il a publié en 2010 “Trop vite !” (Albin Michel) pour alerter sur le court-termisme généralisé.
Créateur de L’Expansion et de Radio Classique, il a fait de Psychologies magazine un succès. Il a lancé, en 2010 le magazine Clés pour nous aider à mieux comprendre le XXIe siècle.

Le livre :Aimer quand même le XXIe siècle

En ce XXIe siècle, nous sommes débordés, souvent inquiets, fascinés par le numérique, nomades dans notre carrière et notre vie amoureuse, incapables de se projeter dans l’avenir, ballottés entre ce qui menace et ce qui promet, plus seul qu’avant, et toujours scotchés à notre écran.
Et si nous vivions une nouvelle « Renaissance », qui fut une époque tourmentée, pleine de doutes, mais riche de créations et de nouvelles libertés ?
Trouver du sens dans ce tourbillon, retrouver du temps au milieu des urgences est peut-être à notre portée, si l’on redécouvre une philosophie de vie laïque au joli nom de sagesse.
On peut trouver des raisons d’aimer, quand même, le XXIe siècle.

Notre avis :

Jean-Louis Servan-Schreiber nous propose une réflexion philosophique sur ce siècle qui, il faut bien l’avouer, commence fort. Le titre en soi interpelle… Les mots “quand même”, mis entre parenthèses, donnent une résonance particulière, un peu ambiguë. Est-ce une sorte de réserve, une ambivalence ? Le titre à lui seul donne envie d’ouvrir l’ouvrage pour en savoir plus. Une fois la lecture commencée, on se laissera facilement emporter par le style de l’auteur, proche du lecteur, et sa voix personnelle et forte. Cependant, le ton est assez différent de celui adopté dans la revue “Psychologies”. Plus personnel, moins détaché, un peu plus académique aussi.

Chaque chapitre commence par une illustration : Si le dessin est rudimentaire, le message est cocasse autant que pertinent :

 Aimer quand même...

L’auteur nous parle de notre temps, de ses problématiques, de ses défis. Il le fait sans concession, de façon directe et lucide ; l’homme moderne est désabusé, non sans raison : “Désormais, on ne nous la fait plus, et nous ne parvenons plus à croire ceux qui nous promettent de changer la vie.”

Il ne laisse pas de côté les nouvelles technologies, qu’il analyse là aussi avec lucidité :

“Au XXIe siècle, le SMS a plus d’influence sur l’usage de la langue que l’académie française.”

“… si nous sommes désormais sept milliards, il y a déjà plus de cinq milliards de téléphones portables en service…”

Faut-il pour autant désespérer ? En fouillant dans l’histoire, l’auteur nous démontre par l’exemple que devons rester positifs. Et tente d’éclairer notre avenir avec la lanterne du passé. Regarder en arrière et constater que l’humanité a toujours été confrontée au drame. Observer le monde avec philosophie. Voir les choses avec plus de hauteur, pour envisager les problèmes de manière holistique, dans leur globalité. Il donne des solutions aussi, du moins des ébauches… Mais dans son discours il y a presque toujours une réserve :

“Cela ira probablement mieux dans 5 ans, au prix d’efforts soutenus, de solidarités nouvelles, d’apprentissage d’habitudes plus frugales.”

“La plupart des anxiétés et les pessimismes actuels à propos de notre époque sont à moins de vingt ans d’horizon, ce qui passe très vite. Une seule est là pour bien plus longtemps, celle de l’écologie.”

Voilà donc un livre intéressant, bien argumenté, riche de citations et d’exemples. Jean-Louis Servan-Schreiber nous parle d’une voix forte, mais aussi très personnelle, qui ne fera pas forcément l’unanimité. Et en définitive, s’il évoque des solutions possibles, avec le concours du temps, aucune n’est simple et certaine. Il y a beaucoup de bonnes ondes dans cet essai, mais toujours assorties d’un “mais”. Comment pourrait-il en être autrement ?

Aimer (quand même) le XXIe siècle – Jean-Louis Servan-Schreiber. Éditions Albin Michel

Date de parution : 12/09/2012  
Article publié par Noann le 12 septembre 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Premier Grand Cru Classé

L’embellie – Audur Ava Ólafsdóttir

Dans un pays où le jour à peine levé étreint la nuit aussi vite, voici le récit d’un voyage insolite. En plein mois de novembre, il fait très doux. Seules la bruine et les tièdes pluies recouvrent les terres désolées d’une Islande, plutôt habituée aux hivers interminables, glacés et enneigés.

Alors que son mari vient de la quitter, une femme brisée décide de faire un voyage pour oublier, fût-ce un instant, le vide et l’absence qui ont pris place dans son cœur. Entre-temps, tandis qu’elle pleure en silence, la chance lui sourira puisqu’elle gagnera un chalet de vacances et une fortune au loto.

Sa meilleure amie Audur, vient à son chevet et lui propose de s’occuper de Tumi, son fils de cinq ans, un peu autiste, un peu déluré, à l’allure étrange. Comme elle ne peut dire non à son amie, elle accepte et emmène le petit garçon faire le tour du pays. Tumi va lui ouvrir les yeux sur un monde différent, celui des enfants, enchanteur et plein de surprises, lui faisant un peu délaisser les récentes meurtrissures de son âme.l'embellie

Et nous voici portés et transcendés par cette fable gorgée de sentiments et de magie. La relation entre cette femme et le petit garçon prend une tournure de conte de fées, mêlant émois, fraîcheur et tendresse. La femme et son petit passager inattendu deviennent de véritables complices dans ce rondeau émouvant où se côtoient harmonieusement mélancolie et allégresse. Entre les lignes se dévoilent morosité et détresse sans que jamais l’auteur ne nous impose le tableau noir de souffrances de l’héroïne en s’entourant des clichés habituels …

L’écriture est fine, glisse comme l’eau sur les galets et jamais ne met le lecteur devant un fait accompli, un drame qui pèse lourd et que l’on endure jusqu’à la fin du récit.

Les paragraphes se suivent et s’enchaînent harmonieusement comme s’entrelacent délicatement les mots dans ce voyage de deux âmes à mille lieues l’une de l’autre, mais tellement unies à la fois.

L’auteur use et abuse d’humour abrasif quand il s’agit de sauver la noirceur d’une péripétie mais tout au long du récit elle fait montre de pudeur et de délicatesse pour accrocher le lecteur. On ne lâche pas des yeux ce roman qui exhorte à la vérité et à l’authenticité.

Après Rosa Candida, on reconnaît ici le talent indéniable de l’auteur à nous livrer une belle leçon de vie.

Un ravissement …

L’embellie de Audur Ava Ólafsdóttir, éditions Zulma

Date de parution : 23/08/2012  
Article publié par Catherine le 10 septembre 2012 dans la catégorie Premier Grand Cru Classé
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vin de table

Pour seul cortège – Laurent Gaudé

Me voici devant un écran vide, avec la douloureuse tâche d’écrire un article mitigé sur un livre reçu (merci quand même pour ce cadeau…) Mais voilà, en tant que blogueur indépendant, il me semble fondamental d’être sincère, à une époque où les journalistes perdent leur indépendance, et les blogueurs reçoivent des services de presse.

J’éviterai de rédiger un résumé. On trouvera la présentation des éditeurs ici, et de nombreux entrefilets qui décrivent en long et en large ses qualités plastiques et métaphoriques, son trente-sixième sens philosophique, et la densité des personnages digne d’un écrivain-psychanaliste, comme feue Jacqueline Harpman (encore que l’auteure ait su troquer sa toque de psy contre celle de romancier…)

Je me concentrerai sur les points qui m’ont semblé négatifs (je mets des réserves – mon avis est tout à fait personnel)

La présentation de l’éditeur évoque “une écriture au souffle épique”. En ce qui me concerne, le souffle épique m’aura soulevé quelques pages, pour me laisser choir durement sur le sol rocailleux de l’empire d’Alexandre le Grand. Ce qui me dérange (un peu) dans cette lecture, c’est l’excès. Tout est construit, tant au point de vue du style que du contenu, pour mettre en exergue violence, brutalité, rancœurs, soifs de domination, craintes, jalousies. Bref, ce qu’il y a a de plus noir dans l’âme humaine. Certes on est à Babylone, en des temps où les préoccupations de l’homme n’étaient pas de cultiver des roseraies. Sur ce point-là, l’auteur nous livre une œuvre magistrale, dressant un portrait extrêmement réussi et convaincant de cette société, du moins telle que nous l’imaginons, avec les distorsions du temps…Pour seul cortège

Dans un articulet sur un autre livre de l’auteur, j’écrivais “Gaudé dessine des personnages sombres dans un abîme de noirceur, mais dans cette noirceur il y a une infinité de nuances”. Ce n’est point le cas ici. La nuance, le relief d’un livre comme “Ouragan” font cruellement défaut. Le romancier se dépasse, il plafonne dans son délire, il atteint un point culminant dans l’excès. Ce n’est plus de l’écriture, c’est de la hargne. C’est l’exploitation méthodique, avec force adjectifs, de la barbarie humaine. Les personnages sont lourds, primaires, bestiaux. Des caricatures conventionnelles. En outre, Gaudé nous fait plonger dans le passé. Certes certes. Mais d’un point de vue historique, c’est maigrichon. Peu de références, peu de descriptions de lieux, peu de faits, de détails. L’auteur est tout entier dans son écriture sinistre, dans les ténèbres de la bêtise humaine, magnifiée à l’extrême.  Même “les Bienveillantes” avait plus de contraste. Dans “Ouragan”, les personnages avaient quelque chose d’exalté, mais l’ensemble était chamarré. On trouvait une diversité de caractères. C’était son charme paradoxal. Exploit non reproduit.

Pour ce qui est de la technique d’écriture, rien de nouveau. Gaudé entrelace des paragraphes où il change de contexte de façon systématique. Le procédé est éculé (je relis ce mot – peur d’une lettre en trop). S’il a bien fonctionné autrefois, il ajoute une complication et oblige le lecteur a un sérieux effort d’attention. Le plaisir de lecture sera donc plus intellectuel qu’intuitif. Autre technique, éculée aussi ( je relis) : amener l’information capitale à doses homéopathiques. L’auteur espère sans doute pousser le lecteur ainsi à tourner les pages frénétiquement pour connaitre la suite. Ça ne marche pas forcément. D’aucuns, dont moi, se fatigueront assez vite,  à essayer de savoir qui est qui et qui fait quoi.

Enfin le style. S’il comporte quelques belles formules, d’autres me laissent sceptique : “la voix a hâte”… (Tentez de lire ces mots à haute voix) “Il est en feu” “Elle est pétrifiée par le deuil”. Formules fortes, oui, mais un peu faciles et stéréotypées.

Si cette lecture n’est pas dépourvue de qualités, loin de là, les ingrédients de l’ancienne recette font défaut.

Pour seul cortège – Laurent Gaudé. Éditions Actes sud

Date de parution : 22/08/2012  
Article publié par Noann le 9 septembre 2012 dans la catégorie vin de table
Vos petits mots... (20)
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Grand vin

En vieillissant les hommes pleurent – Jean-Luc Seigle

Nous voici plongés en 1961, au cœur d’une famille relativement ordinaire. Suzanne est une femme comme il en existe beaucoup, attachée à sa demeure. Son principal souci porte sur un des ses fils, parti se battre en Algérie. Son mari Albert est ouvrier chez Michelin. C’est un homme qui se remet en question sans cesse, d’un tempérament assez mélancolique. À l’aube de la cinquantaine, il découvre qu’on peut encore pleurer, à chaudes larmes, et pour des raisons qui nous échappent parfois.

En vieillissant les hommes pleurentGilles, adolescent atypique, passe ses journées dans les livres, jusqu’à en être complètement absorbé et ne plus mener de vie sociale. Gilles lit du Balzac, et non seulement il le lit, mais il en tire un enseignement, et compare ses lectures au monde qui l’entoure. Mais son tempérament érémitique inquiète son père. Albert voit d’un œil autant affolé qu’émerveillé le penchant de son plus jeune fils pour la lecture. Ce fils érudit, c’est beaucoup pour lui. C’est une revanche sur son statut d’ouvrier, celui qui n’a pas eu la possibilité d’étudier, et qui développe des regrets à foison. C’est une fierté pour la famille. C’est aussi une source d’incompréhension et de soucis.

La vie banale de cette famille ordinaire se déroule à une époque charnière, le début des années ’60. C’est l’arrivée de la télévision dans les chaumières les plus modestes, et de l’électroménager. La femme sera libérée des tâches ingrates, pense-t-on. Les congés payés sont institués. Tout le monde a du travail, oui, mais pas forcément un job de bureau. Le plein emploi est obtenu au prix d’une faible considération pour la main d’œuvre.

On ne trouvera pas dans ce roman d’épopée ni de véritable intrigue. Le lecteur en quête d’exaltation restera sur sa faim. Par contre,  les personnages ont une réelle psychologie, une profondeur et un relief. Cette famille aurait pu rester très ordinaire, mais le talent du narrateur la rend intéressante, attachante même, en dépit de son manque de singularité et d’une relative apathie. L’auteur leur insuffle sa sensibilité. Ils en deviennent denses, complexes, parcourus de tout le doute et de la perplexité propres à l’humain. Ils sont peut-être même trop sensibles. Le petit Gilles tire des leçons de ses lectures qui émerveillerait un prof de lettres à la retraite. Son père Albert est d’une complexité et d’une profondeur de raisonnement peu courantes dans son milieu. Le style est agréable et personnel à la fois, faisant usage d’associations d’idées intéressantes. Bien que je l’aie trouvé parfois un rien alambiqué. Tout en profondeur, à l’image de cette famille. J’ai trouvé la description des rapports entre Albert et sa mère qui perd la raison tout simplement éblouissante de sincérité et de tendresse. Un chapitre beau à en pleurer…

“Le contraste entre ce qu’elle venait de dire, ces jours de fête qui n’étaient pas assez nombreux et les deux mains de sa mère, deux mains d’homme, tordues par le travail par tous les temps, ouvrirent, dans cet espace intime, un sentier d’émotion qu’il n’aurait jamais pu emprunter jusqu’à elle. La pudeur avait toujours empêché toute manifestation des sentiments entre eux pour ne laisser place qu’à une espèce d’affection respectueuse qui les avait tenus à distance l’un de l’autre.”

En vieillissant les hommes pleurent de Jean-Luc Seigle. Éditions Flammarion

Date de parution : 11/01/2012  
Article publié par Noann le 7 septembre 2012 dans la catégorie Grand vin
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Cru bourgeois

L’attachement – Florence Noiville

Anna avait 14 ans lorsque sa maman est décédée. Quelques années plus tard, elle découvre une longue lettre que sa mère avait adressée à son grand amour, un professeur de lettres de trente ans son aîné. Elle avait alors 17 ans.

Anna veut en savoir plus et enquête auprès de ses proches et de ses amis d’antan pour découvrir quelle était la place de cet homme dans le cœur de sa mère, quels sentiments la liaient à lui. Par tous les moyens elle s’acharne à retrouver la trace de cet amour caché, de cet amant secret que sa mère a emporté dans son âme à sa disparition. Peut-être vit-il encore à présent…

L’auteur invite le lecteur à un huis-clos passionnant entre une mère disparue et sa fille. Au fil de se découvertes, la relation entre Anna et sa défunte mère prend la tournure d’un dialogue. Et les secrets enfouis peu à peu se révèlent. Entre elles une complicité naît, qu’elles n’avaient jamais connue ici-bas.L'attachement

Anna en apprend encore et encore sur la vie amoureuse de sa mère, dissolue, compliquée mais si belle à la fois. Et l’auteur d’éclairer les non-dits, de s’immiscer dans ce dialogue de sourds entre une mère au Paradis et une fille désarçonnée par tant de découvertes inattendues.

Un récit mené de main de maître qui emporte le lecteur comme une invitation à une danse légère, un pas de deux jusqu’à ce que la musique se taise. Une écriture leste et un style emporté qui conduisent le lecteur à ne pas lâcher des yeux cette histoire riche en sentiments de toutes sortes, amours compliquées ou maternelles, mais toujours grandioses. L’auteur nous balade aux antipodes sans nous ménager, passant de rire aux larmes, virevoltant d’un sentiment à l’autre avec brio.

Certes… mais je conclurai par un bémol, hélas…

Mon billet sera donc celui que j’appellerai la chronique d’une déception annoncée puisque je suis amenée à assombrir un peu le tableau d’éloges pour vous dire que bien que l’écriture soit magistrale – indubitablement – je déplore simplement que la thématique des secrets de famille remués et disséqués soit visitée et revisitée maintes fois… jusqu’à en devenir un peu lassant, voire même un peu indécent…

L’attachement de Florence Noiville, éditions Stock

Date de parution : 22/08/2012  
Article publié par Catherine le 4 septembre 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

Joseph – Yun Sun Limet

Voici un livre qui était perdu dans une de mes piles à lire, et que j’ai extirpé après avoir lu la quatrième de couverture. Il est question d’une région qui m’enchante et d’une époque où j’écorchais mes culottes sur les bancs d’un collège jésuite. Le sujet avait tout pour m’emballer naturellement…

Quelques mots sur l’auteure :

Yun Sun Limet est née en Corée du sud et a été adoptée par la famille belge Limet. Joseph, qui a donné son nom au livre, est l’oncle de Yun Sun. L’auteure a passé son enfance en Belgique et vit à présent à Paris.

Le livre :

Joseph est donc le frère du père de l’auteure. Qu’a-t-il de si particulier pour que la jeune femme lui dédie un livre ? C’est par le biais d’une bande magnétique que la jeune Yun Sun découvre sa voix de ténor. Son père, qui assiste à la découverte de l’enregistrement, est profondément ému de l’entendre à nouveau. Joseph est parti trop tôt, la veille de son mariage, en 1958. Un accident de moto stupide (mais un accident peut-il être autre chose que stupide ?) Joseph, c’est le souvenir, mais c’est aussi le trait d’union entre les différentes facettes de cette fratrie.Joseph

À travers les échos de cet homme qu’elle n’a pas vraiment connu, l’auteure dresse un portrait des relations dans une famille, entre frères en particulier. Elle remonte aux années d’occupation, quand la famille est partie se réfugier en France pour échapper à la menace nazie. De fil en aiguille, c’est tout un portrait qui se dresse. L’auteure dessine à traits de plume assez brefs et rapides leurs rapports complexes. Ensuite, ce fut le renouveau de l’après-guerre, et l’espoir d’un avenir radieux…

L’écriture est rapide, concise, avec un sens de l’esquisse et une finesse toute féminine. Une certaine nostalgie se dégage de ce récit, rédigé avec soin et un grand sens du détail. Fouillé, mais un peu confus, aussi. Le lecteur devra faire preuve d’attention et d’un certain esprit déductif, pour trouver son chemin dans ce dédale générationnel, qui remonte aux grand-parents et grands-oncles, aux arrières-grands-parents, etc… L’écriture est académique (avec toutefois une syntaxe parfois originale : pour les bobines de l’enregistreur, on parle de roues, d’essieux). Le rythme est rapide. L’histoire ne s’attarde pas. En trois lignes, nous allons de l’invasion allemande à la libération en passant par l’exil. Le principal bémol est propre au genre auto-biographique : cette tendance narcissique à évoquer ses souvenirs, souvent très personnels, parfois trop. Si la lecture est agréable, d’aucuns (dont moi) pourront se perdre dans les détails de cette vie de famille tentaculaire. Le récit évoque l’histoire nationale belge, les régions, de façon un peu décousue, avec pléthore de détails personnels, qui peuvent éloigner du principal. Toutefois, les ingrédients sont là pour élargir le champ de vision… Au lecteur d’avoir la sagacité et la sagesse lui permettant d’en tirer profit…

“Nous n’avons pas été heureux. Chacun a connu des joies individuelles, mais il n’y a pas eu de sentiment qu’avec nous, l’histoire allait vers un mieux, pas d’élan, pas de sourire. Le seul grand mouvement collectif mémorable de cette génération-là restera peut-être la marche blanche.”

Joseph – Yun Sun Limet. Éditions de la différence

Date de parution : 27/04/2012  
Article publié par Noann le 1 septembre 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

Le Chien noir – Florence Tourtourat

Présentation de l’éditeur :

Lorsque sa femme Clémence le quitte, le désespoir du vieil Arsène est grand, si grand qu’il songe à en finir avec la vie. Mais sa rencontre avec un chien errant va, paradoxalement peut-être, lui redonner le goût de vivre et même d’aimer à nouveau.Le chien noir

De son côté, Clémence entame une nouvelle vie, se remet à travailler, fait de nouvelles rencontres et expériences. L’auteur nous emmène avec elle à Ostende faire la connaissance du Sans-Nom, de frères jumeaux peu conventionnels et de la petite Kembo, jeune orpheline rwandaise rescapée du massacre de sa famille.

Mon avis :

L’auteure nous mène dans la petite vie d’Arsène, homme d’un certain âge, voire d’un âge certain, qui se retrouve un beau matin devant un mur : sa femme Clémence le quitte, sans la moindre explication. Nous partageons le périple de cet homme perdu, à la recherche d’un bonheur simple et pourtant si difficile à trouver. C’est un chien noir qui va remplacer Clémence… Un cabot trouvé par hasard, qu’il appelle Tommy. Le lecteur n’aura aucun mal à se glisser dans la peau de cet homme débonnaire, très attachant, décrit avec simplicité et humilité. L’écriture est fluide et agréable, et l’on tourne les pages sans mal. Bien que la route d’Arsène soit un peu convenue, l’histoire est touchante et fera passer un bon moment de lecture.

Le Chien noir – Florence Tourtoura. Mon petit éditeur

Date de parution : 15/09/2010  
Article publié par Noann le 31 août 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Blog de littérature. Critiques, extraits, avis sur les livres…

Dessin de Jordi Viusà. Rédigé par des lecteurs passionnés