vin de table

Une vie en plus – Janine Boissard

Présentation de l’éditeur :

Elle s’appelle Adeline Constant et tous l’envient. Une brillante carrière, un mari amoureux, trois enfants, une belle maison avec jardin à Saint-Cloud. Tout pour être heureuse. Et voici qu’elle démissionne de son travail. A la stupéfaction générale, Adeline a décidé de s’offrir une parenthèse dans sa vie trop pleine pour mieux regarder, écouter, aimer les siens. Être, en somme, une « happy housewife ».Une vie en plus

Raté ! C’était compter sans ses enfants qui, tour à tour, vont lui causer de sérieux soucis. Sans la rencontre avec Mathis, un homme, ardent et passionné qui ne vit que pour la musique à laquelle il initie les jeunes de la ville. À ses côtés, Adeline retrouve le rêve fou de son adolescence : écrire des chansons, mettre les mots en musique. Ensemble, ils conçoivent un grand projet. Jamais Adeline ne s’est sentie aussi vivante, jamais elle n’a tant vibré. Mais si cette « vie en plus » recelait un piège pour les siens, de l’amour en moins ?

 

L’avis de Céleste:

J’ai trouvé la thématique quelque peu ordinaire et cent fois exploitée, celle d’une femme de quarante ans, vivant à côté d’elle, sans plus d’émois, allant jusqu’à négliger un peu de l’éducation de ses enfants qu’elle voit grandir de loin. Le début du récit s’éternise et le lecteur est gavé de pages et de pages encore.
Puis vient le déclic, le remue-ménage dans la tête de l’héroïne, et sa décision de réaliser un rêve longtemps gardé secret dans son cœur. Pour cette nouvelle vie qui commence, Adeline doit prendre le cours de sa vie en mains et de grandes décisions, comme celle d’annoncer à son mari, à sa famille ainsi qu’à son employeur qu’elle se consacrera désormais à son rêve le plus cher, celui de devenir auteur-compositeur. Elle se heurtera à des réactions tantôt positives tantôt mitigées mais s’acharnera pour vivre son rêve jusqu’au bout. Ensuite viennent les ennuis familiaux, comme ceux de tout un chacun, des soucis avec les enfants, des blessures…
La deuxième partie sauve le récit qui se voulait plutôt ronronnant au début. L’auteur nous parle avec intensité du rêve, de la réalisation de celui-ci, avec tous les aléas que cela comporte parfois.
L’auteur conclut par l’apologie de la famille et de ses valeurs fortes, inébranlables, même si le socle qu’elle forme se fissure parfois par trop de coups de marteau piqueur…
Personnellement, je n’ai pas été scotchée à ce récit, refermant le livre, puis reprenant à nouveau le train en marche, l’entrecoupant de la lecture plus attrayante d’un roman reçu la semaine passée, qui, dès les premières lignes, rencontre déjà tout mon enthousiasme …
D’aucuns trouveront sans doute dans ce nouveau roman de J. Boissard un peu de rêverie dans un monde où l’on ne s’émeut plus. Dans ce volumineux récit – 521 pages – je n’ai réussi à me plonger ni à me laisser porter par une plume, certes très belle, quoique un peu longue parfois.

Une vie en plus de Janine Boissard. Éditions Fayard

Date de parution : 01/03/2012  
Article publié par Catherine le 14 mars 2012 dans la catégorie vin de table
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Grand vin

Tangente vers l’est – Maylis de Kerangal

Hélène, une française de 35 ans, qui tente d’oublier son amant Anton rencontre fortuitement dans un compartiment du Transsibérien Aliocha, conscrit russe, appelé en Sibérie pour y exécuter ses obligations militaires auxquelles il aimerait échapper par tous les moyens possibles. L’obstacle des langues les empêche dans un premier temps de bavarder mais ils arriveront à se comprendre petit à petit et poursuivront ce voyage insolite, s’évadant chacun à sa manière, fuyant pour l’une un amour et pour l’autre le devoir militaire…Tangente vers l'est

Pendant quelques jours, Aliocha et Hélène vont partager cette promiscuité secrète et imposée, tous deux contraints à une fuite qu’elle soit sentimentale ou militaire.
Par une plume magistrale, l’auteur fait résonner les mots comme une douce mélopée. Elle plante le décor dans une Russie glaciale et nous balade dans les paysages désolés de la taïga délicatement givrée, où la nature a revêtu un manteau gris, un peu élimé.

Comme dans son excellent roman « Naissance d’un pont » Maylis de Kerangal nous transporte et nous emmène aux côtés de ses personnages, cette fois à l’intérieur d’un train où règne une atmosphère pesante, où l’on sent retentir les échos d’une Russie toujours militarisée, tandis que chaque gare traversée est comme un arrêt sur image, une pause bénéfique. Au dehors l’on aperçoit la beauté de la steppe baignée de rivières aux reflets irisés et on se laisse porter par la grâce et la poésie qui émanent d’Hélène donnant à ce train exhalant un parfum viril et rustre une délicatesse inespérée.

L’auteur nous parle avec beaucoup d’intensité de cet amour improbable, de la rencontre de deux âmes meurtries se laissant doucement glisser sur les rails découpant un paysage austère, si beau mais désespérant…

Troublant et passionnant… Un très beau voyage de l’âme

Tangente vers l’est de Maylis de Kerangal, éditions Verticales

Date de parution : 12/01/2012  
Article publié par Catherine le 11 mars 2012 dans la catégorie Grand vin
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Grand vin

Nos vies désaccordées – Gaëlle Josse

J’avais beaucoup aimé “Les heures silencieuses” de Gaëlle Josse, joli roman basé sur un tableau d’Emmanuel de Witte. Je m’étais promis de me jeter sur la deuxième publication de l’auteure, certain qu’elle n’en était qu’au début de son parcours littéraire. Je n’ai pas dû guetter bien longtemps ce nouvel opus ; avant même que son existence me fût connue, il m’était proposé par l’éditeur, que je remercie. Mais une angoisse m’a étreint tout à coup. Et s’il n’était pas aussi bon que le premier ? J’en serais réduit à une grande déconvenue, et à l’angoisse de devoir faire un billet mitigé. Or voilà qu’une enveloppe arrive trois jours plus tard… Accompagnée d’un gentil mot de l’auteure. L’angoisse redouble. Avec des paroles si aimables à mon égard, comment pourrais-je encore en dire du mal ? Il le faut pourtant. Je me dois d’être sincère, c’est dans ma nature, et si je me montre trop positif, il se trouvera un ou l’autre lecteur pour venir m’accuser d’être dithyrambique et de manquer d’objectivité.

Me voilà donc plongé avec crainte dans ce petit livre, un peu fébrile. Et l’angoisse est de plus en plus forte. Dès les premières pages, on est désorienté. Où est donc passée l’écriture poétique de l’auteure ? Nous sommes ici dans le factuel, porté par un style qui ne manque pas de qualités, mais a priori moins lyrique.Nos vies désaccordées

Le personnage principal, Jacques Vallier, est un pianiste de renommée mondiale. Il nous parle avec une certaine précipitation. Dans un premier temps, il évoque sans s’appesantir  son site Internet de musicien et les nombreux mails qu’il reçoit, dont un en particulier attire son attention. Il est envoyé par l’infirmier d’un centre psychiatrique. Une de ses patientes écoute, à longueur de journée, des CD de Vallier interprétant Schumann. Pour le pianiste, il n’y a pas de doute, cette patiente psychotique ne peut être que Sophie, son grand amour. En moi l’angoisse remonte. Je n’accroche pas à cette lecture. Mais je continue. Alors, Vallier se retrouve face à l’infirmier, il lui explique qu’il a bien connu Sophie, qu’il veut l’aider. L’infirmier est sceptique. Qui est ce Vallier ? Comment Sophie va-t-elle vivre leurs retrouvailles ? Elle pourrait plonger dans un état de torpeur ou de folie plus intense… Vallier va devoir rencontrer les médecins et les convaincre qu’il peut jouer un rôle dans la guérison de Sophie.

Mais comment Sophie et Jacques Vallier se sont-ils connus ? Pourquoi leurs chemins se sont-ils séparés si brutalement, vers la démence pour l’une, la gloire pour l’autre ? Pourquoi le pianiste est-il rongé de remords ? En dire plus serait dévoiler l’intrigue qui est bien plus profonde qu’il ne parait… Eh bien, me voilà rassuré tout à coup. Une sorte de magie opère lentement, vers un tiers de l’histoire. Les personnages prennent de l’ampleur et de la consistance. Leurs tourments suscitent chez un lecteur sensible un véritable intérêt, une passion même. D’autant que d’autres personnes viennent donner du corps au récit, tel Zev, un vieux luthier reclus, à qui Sophie donnait toute son âme. Peu à peu, c’est toute une ambiance qui s’installe, un entrelacs de destins. Magnifique, cet amour qui se dissout dans les affres de la folie, mais reste ardent. Quelle magnificence dans ces destins meurtris, dans l’âme de ce pianiste qui bat sa coulpe avec déraison. Quelle beauté dans cette quête du pardon !

En toute honnêteté, voici un roman court, où tout est dit avec justesse et finesse, sans pathos et effets de style. Je suis rassuré, l’auteure mérite trois étoiles. Je n’ai pu le lâcher qu’au dernier mot, à trois heures du matin (certes je lis souvent jusque deux heures). Il y a une sorcellerie littéraire qui nous maintient dans un monde secret, celui que seul un bon roman peut dessiner.

“À terre, un pot de peinture blanche et un pinceau. Peut-être cela m’impressionna-t-il davantage que le regard absent de Sophie et sa silhouette amaigrie perdue dans ce pull immense. Elle avait renoncé à la couleur, au geste projeté sur la toile, à leur fusion dans l’espace. Elle avait renoncé à elle-même, à tout, sauf à m’écouter jouer. Par la musique, je remplissais ses jours et ses heures, chaque note comme un infime maillon d’une chaîne dont je ne savais si elle l’aidait à vivre ou l’en empêchait. Attente insensée ou consolation ? Comment savoir ?”

Nos vies désaccordées de Gaëlle Josse. Éditions Autrement

Date de parution : 08/03/2012  
Article publié par Noann le 10 mars 2012 dans la catégorie Grand vin
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Cru bourgeois

Rapaces – Patrick Poivre d’Arvor

Chris Rather est la vedette d’une chaine de télévision appelée “Canal première”, où il présente le journal de 20 heures (ça nous rappelle de bons souvenirs…)

Mais qui est donc ce présentateur phare, personnalité adulée des français ? Qu’a-t-il donc de si particulier ? Est-il un grand journaliste ? S’est-il démarqué par un travail, des reportages brillants ? Pas vraiment. C’est plutôt une icône de l’écran, un visage, une présence, à l’instar de ces jeunots qui débarquent et sont mis en avant par leur chaine, avec un salaire plantureux, juste pour leur image, sans qu’on se soucie vraiment de leurs capacité intrinsèques. On devine tout de suite qu’il y a du vécu dans ce “roman” pas comme les autres, et même une certaine amertume. Rather n’est pas un journaliste vénérable, c’est un opportuniste qui a fait un début de carrière aux USA. C’est un playboy qui a su se faire des relations. Mais dans le fond, qui est-il ? Plutôt paumé, drogué à la coke. Décidément, quelques vérités enflammées émergent de ce “roman”…

Eh bien évidemment, comme dans 90 % des romans, il va se passer un drame. Quoi de plus fort qu’un décès ? Le cher Chris Rather est retrouvé près d’un étang. Sa mort semble suspecte. Le présentateur a le cou entouré d’une cravate, lui qui n’en portait jamais, un comble pour une star. Décidément ce type avait un côté iconoclaste, apprécié des spectateurs, pas forcément du gratin…. Sa mort exalte les esprits… C’est qu’elle advient quelques semaines avant les élections ! Une enquête est diligentée d’urgence.

Ce qui est amusant dans ce “roman”, c’est le mélange de réalité et de fiction. Point de vue fiction ; il y a cette chaine de télé, “Canal première”… On pense à Canal+ . Cependant, son propriétaire possède aussi un groupe de téléphonie mobile… Ensuite, ce Chris Rather… Les spéculations iront bon train quant aux intentions de l’auteur…

Mais il y a aussi un côté drôlement réaliste. Le président de la république, en personne, est clairement nommé, et le moins qu’on puisse dire c’est que l’auteur n’en dresse pas un portrait flatteur. “À dire le vrai, Nicolas Sarkozy n’avait jamais tenu les journalistes en grande estime, pas davantage que ses prédécesseurs, mais il savait bien les utiliser quand ça l’arrangeait”Rapaces

On peut toutefois se demander l’utilité de ce brûlot, publié en période charnière de campagne présidentielle… Il y a de la revanche dans l’air. Ce “roman” outre son histoire propre, ne porte-t-il pas un message en filigrane, un sens à la désertion de Patrick Poivre d’Arvor du petit écran ? Les personnages, virtuels ou réels, tissent des liens subtils, où la duplicité est reine.

Mais le grand intérêt de ce “roman”, c’est évidemment la personnalité de son auteur, grand connaisseur du milieu. De plus, il ne mâche pas ses mots. Son récit est sans concession, revanchard sans aucun doute, écrit à grandes doses de vitriol. Les personnages sont plus que réalistes, l’auteur se plait à dévoiler l’hypocrisie, les malversations, les ententes entre état et médias, la face cachée des stars. Il se positionne comme narrateur omniscient, se glisse dans leurs pensées perverses. Même si le procédé est utilisé de façon un peu systématique, il fonctionne, et donne un résultat assez jouissif… Voir des personnalités tournées en dérision n’est pas désagréable. Quant aux personnages fictifs, on s’amusera à les rapprocher de figures réelles, et à démêler le vrai de l’imaginaire. Par contre, qu’on ne s’attende pas à un grand thriller avec des intrigues emboitées. L’histoire est relativement simple. Mais c’est du Poivre d’Arvor, et au regard de l’actualité, ce bouquin prend une autre dimension.

“En fin d’après-midi, une rumeur se fit insistante dans toutes les rédactions: le président de la République lui-même avait menacé de mort Chris Rather quelques heures avant sa disparition. Il aurait été furieux de l’interview de la veille et des velléités de candidature du présentateur à la présidentielle. Tout était parti du blog d’un journaliste reconnu, spécialisé dans la vie des médias. Il allait jusqu’à mettre en cause le Canard enchaîné qui avait eu vent de l’information mais s’était refusé, faute de preuve, à l’imprimer dans le numéro qui allait paraître le lendemain.”

Rapaces – Patrick Poivre d’Arvor. Éditions du Cherche midi

Date de parution : 08/03/2012  
Article publié par Noann le 7 mars 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

Une vie sans gluten – Delphine de Turckheim

Faut-il encore présenter Delphine de Turckheim ? Un peu quand même, pour ceux qui passent plus de temps dans les livres que devant un écran de télé (eh oui ça existe encore…) Delphine a été animatrice de télé pour Intervilles, Mon incroyable fiancé, 100.000 euros sur la table, et Un verre de terroir.

Elle prend la plume pour nous raconter sa vie de malade de l’ombre, victime d’intolérance au gluten, plus scientifiquement “maladie cœliaque”. Cette affection provoque une destruction des villosités, les parois internes de l’intestin grêle, qui entraine de nombreux désagréments, amaigrissement, baisse du système immunitaire, dépression, et dans certains cas, cancer. À l’époque où sa maladie se déclare, elle est encore fort méconnue du grand public, et même des médecins. Ceux-ci pratiquent sur Delphine une suite d’analyses, sans résultat ; la petite Delphine – elle est encore bébé – sera considérée comme une enfant difficile : “Quand elle cessera d’être une ’emmerdeuse’, elle mangera, elle assimilera, et elle grossira, vous verrez !” Fort heureusement, un médecin pas comme les autres, le docteur Jacob, sera plus perspicace, il conseillera l’ultime examen que ses collègues déconseillent à l’unanimité : une biopsie intestinale. L’examen est concluant : la petite est intolérante… “Je crois qu’à ce moment, si mes parents l’avaient pu, ils auraient embrassé le docteur Jacob.” La solution est relativement simple. Pour guérir, il lui “suffira” de ne plus avaler le moindre milligramme de gluten…Une vie sans gluten

Ne plus avaler de gluten, c’est facile à dire, mais il y en a dans presque tout ; dans la farine de blé, et donc dans le pain, les pâtes, les gâteaux, mais, de façon plus insidieuse, les industriels ont pris la mauvaise habitude d’en intégrer dans nombre d’aliments, et tout ceci en oubliant parfois de le mentionner sur les emballages… Commence alors une croisade contre la nourriture qui durera toute une vie. Deux nouvelles biopsies seront pratiquées à l’âge de douze ans, mais l’espoir sera de courte durée.

C’est surtout vis-à-vis de la société que le problème semble difficile à gérer… Jalousies, remarques, la vie d’un intolérant au gluten est décidément bien compliquée…

Delphine de Turckheim nous livre ici un témoignage personnel concis et sans pathos, ou si peu. On se prend d’amitié pour cette petite fille pas comme les autres. Elle démontre aussi l’absurdité et la suffisance du corps médical, alors que la nature même d’un problème lui échappe. Et puis aussi, elle nous apprend que 500.000 personnes sont touchées par cette maladie en France, mais que seuls 10 % le savent. Diable, voilà une nouvelle d’importance… Je cours faire un bilan. Merci Delphine de m’avoir ouvert les yeux.

Une vie sans gluten – Delphine de Turckheim. Éditions Tchou

Date de parution : 01/03/2012  
Article publié par Noann le 5 mars 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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Grand vin

Des gens très bien – Alexandre Jardin

D’avril 42 à octobre 43, Jean Jardin, grand-père de l’auteur, est le principal collaborateur de Pierre Laval, chef du gouvernement du maréchal Pétain. Alors que le 16 juillet 1942 a lieu la rafle du Vél’ d’Hiv, Jean Jardin est directeur de cabinet de Pierre Laval …
Comment ce grand-père « respectable » a-t-il pu rester en fonction après la rafle s’interroge légitimement l’auteur ? Il se décide alors de sonder le passé familial afin de faire ressortir le démon de sa boîte, ôter tous les ornements de ce grand-père indigne et mettre à nu des vérités qui font mal.

Courageusement Alexandre Jardin se débat, tombe les gants et met à profit une plume mouillée d’acide pour écrire son désarroi, sa peine d’être un homme bien né, issu d’une famille vénérable.
L’auteur se fraye un chemin pour découvrir des vérités enfouies, jamais mises en lumière. Et pour ce faire, il va explorer les archives familiales, mener une enquête. Alexandre Jardin, auteur romantique jusqu’ores, utilisera cette douce étiquette pour approfondir ses recherches et approcher la vérité, même si celle-ci est effrayante, ignoble.Des gens très bien

Et pour avoir osé remuer le passé il se voit couvert de griefs … Il se heurte d’abord à l’ire de son oncle Gabriel qui le traite de menteur puis aux accusations d’historiens qui lui reprochent d’en dévoiler un peu trop sans donner de preuves.

Face à tous ces boucliers, l’auteur se montre de plus en plus outré et ses mots prennent des allures d’épées tranchantes combattant l’ennemi dans une arène.
Mais chemin faisant, la sensibilité et la sincérité de l’auteur ressortent pleinement et viennent alors les questions bien légitimes : même si l’on n’est pas responsable des méfaits de ses ancêtres, n’a-t-on pas le droit de les regarder en face tout simplement ?
Il pose la question fondamentale : « est-on responsable des agissements de ses aïeuls? », ceux-là glorifiés et respectés dans leurs habits de lumière ?

Un récit fort et sensible à la fois qui nous parle de grands-parents respectables, des « gens très bien », très fréquentables, délicieux, qui portent un masque camouflant leur personnalité de monstre …

Des gens très bien d’Alexandre Jardin, Le livre de poche

Date de parution : 05/01/2011  
Article publié par Catherine le 5 mars 2012 dans la catégorie Grand vin
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Cru bourgeois

Jolie libraire dans la lumière – Frank Andriat

Un matin, un peu par hasard, une libraire découvre un livre à petit tirage, publié chez un éditeur inconnu. C’est une révélation.. Non seulement le texte est attachant, mais c’est une histoire qui lui parle, et plus elle entre dans l’histoire, plus elle est troublée. Les personnages portent son nom et celui de son fils, et même de son frère, cette histoire est la sienne en tout point…

Sur ces entrefaites, un lecteur entre dans le boutique, s’émeut de voir cette jolie libraire dans la lumière, si absorbée dans sa lecture, dégageant un halo de bonheur. Ils font connaissance, se revoient, il lit le livre lui aussi, s’aperçoit que cette histoire est aussi la sienne, c’est du vécu, il y était.

“Dans un train”, tel est le nom de ce livre dans le livre, qui raconte l’histoire d’une jeune femme de 23 ans, mère d’un fils de 6 ans. Elle rencontre un homme dans un train, et mystérieusement, alors qu’elle fuit les inconnus, elle lui dévoile une partie de sa vie, de ses souffrances, de sa méfiance à l’égard des hommes. La libraire se reconnait, elle nourrit la même méfiance farouche, même vis-à-vis de ce client à la voix douce… Elle aime son contact mais des sentiments naissent, synonymes d’espoir autant que de danger.

Voici donc un roman tout à fait charmant, porté par une écriture sans chichis, toute en émotions. Les passages lyriques décrivant cette jeune et jolie personne dans sa librairie sont de toute beauté. L’intrigue est bien construite, même si l’on sera peut-être déçu du dénouement assez logique. C’est une lecture bien agréable, à laquelle je relèverai toutefois deux petits bémols, qui auront plus ou moins d’importance en fonction de la personnalité du lecteur. Le premier c’est que, si l’émotion est bien présente et souvent touchante, elle est un peu trop systématique. La scène de l’accident est traitée avec tant d’emphase, elle en devient exagérée, voire surréaliste.Jolie libraire dans le lumière

L’émotion c’est comme l’impôt, trop d’impôt tue l’impôt. Mon second bémol, plus personnel, porte sur cette sorte de hargne curieuse que l’auteur voue à l’individu de genre masculin. Sur les quatre hommes de ce récit, trois sont des salauds, le quatrième, le client, est plus délicat, bien que sa motivation première soit le charme sensuel de la libraire. Bref, tous les hommes sont grivois. Voilà donc, sur le fond, une approche qui m’a semblé un peu manichéenne. Cela se confirme quand, page 41, l’auteur sort de son rôle neutre de narrateur : “…elle préférait les hommes dans les livres que dans la la vie où ils se révèlent souvent des prédateurs.” En voilà une assertion bien discutable ! Ensuite : “Ça coinçait lorsqu’elle se retrouvait en face d’un gros con qui matait son décolleté…” Curieux aparté primaire dans un livre d’essence poétique… L’auteur a-t-il eu comme amante Élisabeth Badinter, ou a-t-il un vieux complexe d’œdipe mal négocié ? Ou est-ce  un phénomène de mode, comme les tatouages ou le piercing, qui consiste à balafrer l’homme de toutes les tares ? Pourquoi cette stigmatisation de l’homme à outrance, jusqu’au fond des romans bien intentionnés ? Si le roman a une belle facture formelle et un message intéressant, il véhicule l’un ou l’autre cliché et idée simpliste. Dommage…

Jolie libraire dans la lumière – Frank Andriat

Date de parution : 26/01/2012  
Article publié par Noann le 2 mars 2012 dans la catégorie Cru bourgeois
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vin de table

Crépuscule – Michael Cunningham

Rebecca et Peter vivent à Soho, dans un loft confortable. Peter est galeriste, en pleine crise de la quarantaine tandis que Rebecca s’occupe d’une revue d’art. Tout cela est d’une banalité affligeante … Une petite vie qui roucoule, sans histoires, sans anicroche et chacun y met du sien pour qu’il en soit ainsi. Même s’il surgit parfois des conflits, ceux-ci restent larvés ou évités subtilement pour ne pas faire chavirer la bonne entente. Les disputes ou hostilités sont soigneusement évitées afin de ne pas bousculer le train-train quotidien.

Mais voici que des facteurs extérieurs viennent secouer ce couple idyllique : la fille unique qui s’envole loin de la cellule familiale, la lente agonie d’une amie proche et surtout le retour de Mizzy, frère de Rebecca, d’abord étudiant hors pair, qui bascule ensuite dans la drogue, après avoir déserté l’Université de Yale. Le beau Mizzy va à lui seul déchaîner les foudres de la petite famille sans histoire. Beau, sensuel, menteur, voleur, il mourra d’avoir tout vu, tout essayé, tout connu. Mizzy s’éteindra de trop…Crépuscule

L’auteur entraîne le lecteur dans un huis-clos oppressant, en enchâssant peu à peu dans l’histoire du couple des contrariétés qu’il ne connaissait pas, entre autres engendrées par la venue du frère maudit de Rebecca.

Et voici le lecteur embarqué pour un périple de trois cents pages, haletant, du moins au début, mais fatiguant aussi. Tour à tour, on assiste à l’éclatement insidieux de ce couple que rien ne pouvait ternir, à sa ruine aussi…

L’auteur livre une série de réflexions sur le sens de la vie. Faut-il vivre dans l’enfermement d’idées toutes faites, politiquement correctes, ou bien faut-il se laisser aller à la dérive, laisser voguer son âme sans gouvernail, se laisser aller à l’excès… juste pour vivre jusqu’au bout de son rêve ?

Un récit psychologique mené de main de maître mais qui s’essouffle et rend le lecteur désarçonné, suffocant même, par une écriture étroite, voire étranglée.
Alors que l’auteur se débat dans les méandres de son récit, le lecteur, épuisé, attend que le mot de la fin retentisse enfin, qu’une réponse soit apportée aux questions posées…
J’ai refermé ce livre, un peu déçue, désillusionnée même…

Crépuscule de Michael Cunningham, éditiond Belfond

Date de parution : 02/02/2012  
Article publié par Catherine le 1 mars 2012 dans la catégorie vin de table
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Blog de littérature. Critiques, extraits, avis sur les livres…

Dessin de Jordi Viusà. Rédigé par des lecteurs passionnés