Grand vin

Plus encore – François de Closets

Qui est François de Closets ?

Journaliste et écrivain. Il était producteur et animateur “des grandes énigmes de la science”, sur France 2. Il a été l’auteur de plusieurs livres, dont le fameux “Toujours plus”, en 1982, qui dénonçait les dérapages de la politique française, révélant à un public stupéfait l’ampleur des inégalités générées par notre modèle social perverti…

“PLUS ENCORE” fait le bilan, 25 ans plus tard, de ces “dérapages” monstrueux, qui sont en train de “couler” le pays ! Et on se rend compte aujourd’hui du pragmatisme de ses prévisions :
Chômage, précarité, retraites, soins, dette colossale, endettement de 55% des français, immigration incontrôlée et insécurité représentent l’héritage que nous ont laissé les technocrates ayant géré le pays, depuis mai 68 !

plus encoreAprès avoir reçu en partage une France prospère, championne de la croissance, ces générations d’élus incompétents laissent un pays défait, en pleine crise douloureuse. François de Closets a refait l’enquête, en explorant le monde des français privilégiés et la misère des plus exposés…

L’écart est devenu effarant entre les gagnants et les perdants du système. Les premiers prospèrent à l’abri de la crise, au détriment des seconds qui sont pris dans la tourmente de l’insécurité mondiale.

Son analyse est implacable, dénonçant aussi bien l’abus du patronat et des privilégiés que celle des syndicats, chacun cherchant à tirer à soi la couverture des avantages, sans se préoccuper des conséquences pour l’économie du pays. L’enquête, impartiale, a fait grincer bien des dents, aussi bien dans un camp que dans l’autre !…

J’ai aimé ce livre pour sa franchise et les évidences dénoncées, avec un pragmatisme inégalé. Toutefois, il n’est pas à classer dans les livres destinés à nous distraire. Cet ouvrage est à lire absolument,si l’on veut affiner ses connaissances sur les problèmes actuels de société.


Christian Défi

Plus encore – François de Closets. Éditions Fayard – Plon

Article publié le 10 septembre 2010 dans la catégorie Grand vin
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Grand vin

Infrarouge – Nancy Huston

Rena, 45 ans, photographe, mère de deux enfants, quatre maris et de nombreux amants … Cette femme tourmentée part quelques jours en Toscane avec son père Simon et la compagne de celui-ci.

Des vacances, qui s’annonçaient reposantes, vont tourner au cauchemar … Simon n’a plus la vivacité d’esprit d’autrefois et Ingrid, l’épouse hollandaise, est inculte … Vacances stériles …

L’auteur nous invite à suivre Rena, à travers huit chapitres palpitants qui s’enchaînent sans laisser un instant de répit au lecteur. Elle raconte ses colères à une amie imaginaire – refuge virtuel -, ses agacements face à la vie de couple, ses déceptions, ses souvenirs aussi, à commencer par ceux des hommes qui ont croisé sa vie, son goût pour l’amour.

Une première approche de cet auteur dont j’avais tant entendu parler et qui jusqu’ores ne m’inspirait pas … Et pourtant, voici un livre coup de cœur. Elle exploite en profondeur les thèmes comme  la famille, berceau de nos douleurs, l’absence de mère et ce féminisme revendiqué qui n’empêche pas le goût des hommes, tout cela dans une sorte de cavalcade de mots justes, vrais, émouvants.

De ce journal doux-amer on ressort certes bouleversé  mais finalement encouragé, avec le sentiment d’avoir refermé un livre fort, magnifique …

Sur la banquette rouge du café, Rena se penche de plus en plus vers la droite, s’effondrant doucement, insensiblement, contre le corps replet et maternel d’Ingrid. La nuit a été blanche, totalement blanche. Ingrid met un bras autour d’elle et il ne serait pas facile de dire qui, dans ce duo féminin, s’accroche à qui. Bien qu’elle ait les yeux fermés, Rena n’est pas en train de s’endormir, au contraire, elle capte les odeurs de javel et de lait moussant, sent l’âpreté du tabac au fond de sa gorge, trouve doux le contact du chemisier d’Ingrid contre sa joue et infiniment rassurants les bruits du café : tintement de cuillers, portes qui s’ouvrent et se referment, voix surtout, diverses et superposées, hommes d’affaires pressés de prendre leur ristretto avant d’embarquer pour Rome, ivrogne qui commande sa première bière de la journée, annonces sur haut-parleur des trains en partance ou à l’arrivée, bavardages entre serveuses.

Infrarouge – Nancy Huston, Actes Sud

Article publié par Catherine le 8 septembre 2010 dans la catégorie Grand vin
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Premier Grand Cru Classé

Une belle histoire d’amour qui finit bien – Xavier Deutsch

L’histoire d’un trio : Zoé, Achille et Paul, qui est aussi le narrateur. Trois copains de longue date qui tissent une complicité inébranlable.

Zoé tombe amoureuse d’un homme de trois fois son âge, Charles, un magistrat (détail important !) particulièrement sadique, manipulateur et dominateur. Charles pousse Zoé à coucher avec un inconnu, pour le lui reprocher l’instant qui suit. Il la culpabilise et lui conseille un psy. Un psy, justement, le prétexte est bon pour retrouver ses amis et couper son portable… Car Charles interdit à Zoé toute sortie, il lui téléphone cent fois quand elle part et la tance quand elle ne répond pas. Il y a aussi la messe, où le trio se retrouve tous les samedis… Puis Zoé propose un jour à ses comparses de se rendre à une soirée costumée mondaine… Là, Paul rencontre Sigrid, dont il tombe fou amoureux.

J’ai rarement lu autant de pages en si peu de temps, j’ai avalé les 80 dernières en  trois quarts d’heure. L’auteur m’a mené par le bout du nez dans son roman tendre et drolatique à la fois. Le fait qu’un magistrat soit tourné en ridicule m’a plu tout particulièrement. On se glisse dans la peau de Paul, qui parle de lui et de ses amis avec bonhomie et vérité. Un homme authentique, amusant, touchant.

Il y a aussi le style Deutsch, une écriture de qualité globalement, qui n’exclut pas les mots vulgaires  (dommage !). Son style s’est poli avec le temps. Dans certains de ses livres, il était parfois alambiqué, moins maintenant.  J’ai trouvé ce roman jouissif et bien ficelé. Seules les dernières pages m’ont déçu. Par bonheur, Deutsch est enfin publié chez un éditeur bien distribué, après avoir longtemps erré chez un petit belge peu sérieux d’un nom très court.

Zoé n’allait pas très bien. Elle avait mal choisi son moment : j’avais l’esprit tourné d’un autre côté. L’amour est un sentiment généreux qui rend égoïste. A la brasserie Terre-Neuve, ce jeudi-là, et bien que fidèle à elle-même, elle ne se fût guère épanchée sur ses avanies, je crois bien ne l’avoir jamais écoutée que d’une oreille ; de l’autre, j’entendais la voix intérieure qui murmurait les termes de ma prochaine lettre à Sigrid

Une belle histoire d’amour qui finit bien – Xavier Deutsch. Éditions Robert Laffont

Article publié par Noann le 2 septembre 2010 dans la catégorie Premier Grand Cru Classé
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Cru bourgeois

Le jour avant le bonheur – Erri De Luca

Erri De Luca nous offre l’histoire d’une complicité touchante entre un jeune garçon orphelin, qui est aussi le narrateur principal, et son mentor, don Gaetano, un homme à tout faire, concierge, plombier, et qui est surtout un sage capable de lire dans les pensées, selon lui. Don Gaetano parle de l’histoire de sa ville, de ce juif qui est resté cloitré dans un réduit sous une statue pendant des mois, il évoque le débarquement et l’insurrection des habitants contre l’ennemi. Peu à peu se tisse une complicité de plus en plus magique entre les deux hommes. En filigrane apparait aussi la petite fille, celle qui restait secrètement dans l’ombre du troisième étage quand le garçon, dix ans plus tôt, allait rechercher le ballon de foot en grimpant aux tuyaux. Don Gaetano initie son complice aux choses fondamentales de la vie. J’ai trouvé l’histoire touchante, par de toutes petites choses subtiles, les sauts entre entre passé et présent, l’entrelacement des voix du garçon et de son mentor, et leur complicité grandissante.

Ceux qui ont l’habitude de fréquenter ce site (ça existe) savent que je suis sensible au style. Sur ce point, je ne suis pas totalement satisfait. Mon esprit a parfois trébuché sur ce texte pourtant simple. J’ai fait quelques aller et retour dans les paragraphes, j’ai dû revenir en arrière. Finalement, j’ai sauté les passages où j’achoppais pour passer à la suite.  Quelques belles phrases. D’autres imbuvables, mal structurées (voir l’extrait). Évidemment, si on traduit des expressions napolitaines mot pour mot en français, il y a forcément un petit problème.

Bref, trois étoiles pour l’histoire, zéro pour la traduction. Au total ça fait une étoile et demie, comme je suis gentil j’en mettrai finalement deux.

“Je t’ai attendue jusqu’à oublier quoi. Une attente est restée dans mes réveils, quand je saute du lit à la rencontre du jour. J’ouvre la porte non pas pour sortir mais pour le faire entrer.”

J’appuyai ma tempe sur la sienne.

“Anna, il s’est écoulé une éternité.

– C’est fini. Maintenant commence le temps, qui dure des moments.”

Le jour avant le bonheur – Erri De Luca. Éditions Gallimard

Article publié par Noann le 31 août 2010 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

Poète et paysan – Jean-Louis Fournier

Parce qu’il est amoureux et pour la séduire, il s’est dit un jour qu’il « ferait bien paysan » … Histoire de reprendre plus tard la ferme de son beau-père. Mais le plancher des vaches ne ressemble en rien aux belles images du gai laboureur qu’il avait rêvées. Et ces images se sont brusquement figées pour laisser place à un quotidien qui sent la bouse et le fumier …

Les journées sont lassantes … Il trace de longs sillons dans une terre qui garde la même couleur, même baignée de soleil. Et dans ces longs sillons parallèles qui lui donnent des étourdissements, il se sent comme l’enfant puni, forcé de faire ses lignes …

L’auteur mélange tendresse et causticité dans cette chronique campagnarde et l’on s’y fond avec bonheur. A travers des mots simples, un style épuré, il nous raconte la campagne de façon charmante. Il nous conte aussi le malaise paysan, les déboires d’un homme de la ville qui s’accroche tant bien que mal à cette vie remplie de boue, d’odeurs de bétail, parce que l’amour pour une fille de père fermier a pris le dessus …

Certes il y a des passages qui sont un vrai délice d’humour et de fraîcheur. Cependant, d’autres bouts du récit sont trop laconiques, morcelés voire un peu décousus  jusqu’à déstabiliser le lecteur …

Poète et paysan – Jean-Louis Fournier, Stock.

Article publié par Catherine le 31 août 2010 dans la catégorie Cru bourgeois
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Cru bourgeois

Funérarium – Etienne Ethaire

Laetitia apprend d’un simple coup de fil la mort de son père. Funérarium est le récit en 98 pages des trois jours entre cette mauvaise nouvelle et l’inhumation. Un plongeon instantané dans un tourbillon morbide. Pour corser le tout, Laetitia n’est pas une femme ordinaire, mais un écrivain sensible et angoissé. C’est à travers son esprit complexe et torturé que nous vivons les jours qui précèdent l’entrée fatidique au funérarium.

L’auteur nous fait entrer d’un bond dans la vie de cette fille névrosée, et nous fait suivre un à un tous ses actes et ses tourments. C’est avec une voix forte qu’il nous parle, en n’oubliant pas de nous servir quelques sarcasmes servis par une plume bien trempée. Une écriture directe et sans chichis,  mais une écriture univoque aussi. Le lecteur assiste impuissant à ses tribulations, et voyage dans les anfractuosités de son esprit. Il y a de la douleur mais aussi quelques moments de rire, plutôt jaunes. Le choix d’une voix unique, celle de la narratrice, donne un côté intimiste, séduisant. A contrario on pourrait préférer la liberté d’un narrateur extérieur et donc omnipotent et omniscient.

J’ai apprécié un certain anti-conformisme et un refus de tout traitement commercial. L’auteur a eu envie de se glisser dans la peau de cette femme, et il le fait sans ambages, sans clichés, sans exploiter aucune des recettes du roman, sans chercher particulièrement à plaire, sans pathos ni ruse de séduction. Il semble avoir laissé s’exprimer sa liberté d’artiste. Ce qui en fait une œuvre singulière, intéressante, mais qui ne figurera pas aux côtés de Musso ou Lévy (près du rayon charcuterie des supermarchés). Tant mieux !

Au niveau de l’ego, les écrivains sont des monstres de démesure.

“Ni fleurs ni couronnes. Venez plutôt danser sur ma tombe” mon père s’esclaffait. Même la volonté des morts, j’ai du mal à la respecter. Malgré une réticence, j’achète des fleurs. Blanches, uniquement.

Funérarium – Etienne Ethaire. Éditions du Somnambule Equivoque

Article publié par Noann le 29 août 2010 dans la catégorie Cru bourgeois
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Grand vin

Le Papillon de Siam – Maxence Fermine

Début du XIXième siècle. Henri Mouhot n’a qu’une idée en tête depuis son enfance : voyager, toujours plus loin. Son rêve absolu : parcourir le Siam. Avant d’avoir la possibilité pécuniaire de réaliser son rêve, Mouhot se fera des économies en acceptant un poste de précepteur en Russie, puis rencontrera une écossaise en Italie, qu’il épousera à Edinburgh, ils vivront sur l’île de Jersey. Très vite las de sa vie rangée, il la quittera pour partir au Siam. Il obtiendra une bourse du gouvernement anglais, très soucieux de conquêtes et de prestige à l’époque. Toutefois l’académie des sciences lui enjoint, comme but de la mission, d’acquérir un papillon du Siam, espèce très rare et protégée par le Roi, dont la capture conduit à avoir la tête tranchée, ou autres joyeusetés…

Ce livre est tout à fait dans la même veine qu’Opium ou l’Apiculteur. En réalité ce n’est pas vraiment un roman mais une biographie romancée. Fermine exploite toujours les mêmes recettes. Par contre j’ai trouvé que son écriture avait évolué. J’avais déploré une certaine légèreté dans ses romans, et je le lui avais dit. Dans “Opium”, la ville de Shanghai était peu et mal décrite, ce qui donnait un côté peu crédible et superficiel. Dans le Papillon de Siam, il s’est beaucoup investi dans la documentation. Son livre est ponctué de notes historiques et de détails géographiques, qui rendent la lecture intéressante et lui donnent du corps. Son style a changé, avec un vocabulaire plus étoffé et très rigoureux. En revanche, il a aussi perdu un peu de sa simplicité… et de sa poésie ! Quoi qu’on puisse lire sur certains sites, le style Fermine n’est pas plus mauvais qu’avant. Il est différent, plus riche et plus précis.Bien entendu, cela demande plus de concentration, et certains de ses anciens lecteurs pourraient ne pas apprécier, ceux qui aimaient précisément les phrases courtes… mais simplistes… il faut aussi le reconnaitre ! Moi j’ai bien aimé.

Au rang des bémols je dirai que la fin se veut trop morale et philosophique. Dernières pages un peu légères, mais un récit bien agréable quand même. Maxence évolue. Il a peaufiné son style, il sait manier une encyclopédie (ou Wikipédia). Bien. Maintenant il faut apprendre à gérer plus que deux personnages. Allons Maxence, le Goncourt est droit devant !

“Au mont Phrabat, où vit le prince de la montagne, qui a fait vœu de pauvreté mais ne sort jamais de son monastère qu’en palanquin porté par des pages et escorté d’une nuée de jouvencelles, j’ai découvert que des dignitaires du pays ne suivaient pas toujours les préceptes qu’ils donnaient aux autres.”

Le Papillon du Siam – Maxence Fermine. Editions Albin Michel

Article publié par Noann le 25 août 2010 dans la catégorie Grand vin
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Premier Grand Cru Classé

Dans la nuit brune – Agnès Desarthe

Marina perd son petit ami dans un accident. Plus que troublé, son père Jérôme mène l’enquête, qui débouchera à l’orée d’une autre nuit brune, celle du temps où, enfant sauvage il sera finalement adopté.

Ce père bouleversé par la mort tragique du fiancé de sa fille doit à présent à la fois trouver la force pour la consoler et se replonger dans ce qu’était sa vie à lui, jadis, lorsqu’il fut trouvé par un couple âgé dans la forêt et recueilli ensuite.

Dans la nuit bruneL’auteur trouve le ton juste, sans apitoiement, mais une émotion frissonnante pour cette quête d’identité où la lumière a besoin de la nuit pour exister.

Une balade triste sur la recherche des origines que l’auteur nous livre avec intensité, à travers une écriture limpide et légère. Elle dresse le portrait d’un antihéros secoué par un passé lourd de secrets enfouis qu’il faudra remuer pour trouver des explications à cette disparition insurmontable. Son entourage lui sera-t-il d’un quelconque secours ?

Une fable sur les relations parents-enfants, mais aussi l’apologie de l’amour et de l’amitié lorsque le désarroi réunit ceux qui s’étaient aimés et déchirés ensuite …

Percutant …

Ce roman m’a touchée en plein cœur …

“Je vais mal a pensé Jérôme. Je vais comme un homme abandonné. Je vais comme un coureur de marathon qui se fait souffler la victoire à deux cents mètres de l’arrivée.”

Dans la nuit brune – Agnès Desarthe, Editions de l’Olivier.

Article publié par Catherine le 23 août 2010 dans la catégorie Premier Grand Cru Classé
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Dessin de Jordi Viusà. Rédigé par des lecteurs passionnés